Lancer de dé

Une fugace sourire amusé se dessina sur les lèvres d'Alexis à la remarque d'Erwin mais la réalité la rattrapa bien assez vite en faisant un bilan du chaos régnant dans cette nouvelle salle. Des guerriers-squelettes d'un côté, un monstre à deux langues tranchantes de l'autre. Un dôme d'ombre ne pouvant pas encaisser indéfiniment. Et... et une Bille qui fonce dans le tas et se ramasse lamentablement. Voyant que le monstre s'approche de Billie, Alexis bondit en avant pour se placer devant Billie et bondit en avant pour attaquer le monstre. Un bras toujours ballant sur le côté, Alexis réussit tout de moins à blesser le monstre à l'une de ses langues avant de reculer avec rapidité pour se remettre devant Billie maintenant sur pieds. En regardant la matière visqueuse qui coule le long des langues du monstre, Alexis réalise soudainement quelque chose :

« Ses langues... elles paralysent. »

Ou peut-être seulement une. Qui sait.

Malgré la tentative de Billie qui avait eu le même effet que l’apparition d’un second monstre, l’équipe de demi-dieux s’était plutôt bien débrouillée pour se débarrasser de la créature infâme qui leur avait fait face. Il fallait avouer que la chute ridicule du monstre avait pas mal aidé. Même Erwin n’avait pas souvenir de s’être un jour montré aussi pitoyable…

La chasseresse, après le flop de son action, s’était vêtue d’un masque de confiance et avait franchi la porte suivante avec aplomb. Un aplomb qui retomba bien vite comme un soufflé lorsqu’elle découvrit le néant devant elle. Par-dessus l’épaule de Billie, Erwin ne voyait rien. Il avait beau se concentrer, il ne sentait rien non plus. Les vibrations n’étaient pas plus marquées que celles provoquées par des cailloux vacillant sur le sol. Pourtant, il y avait quelque chose, c’était sûr…

"Au secours !"

La voix creva le silence, emplit le vide. Erwin sentit une un frisson d’angoisse le foudroyer. Il eut l’impression que le sol s’effondrait, sa respiration devint désordonnée. Maman.

Le Tortionnaire détenait sa mère, quelque part, face à qui sait quel monstre horrible. Erwin n’avait plus ressenti cette sensation de détresse depuis qu’il avait cru perdre Alexis dans les même circonstances. Une image s’imposa à son esprit, des naseaux écumants, un regard plus sombre que les ténèbres, des cornes ensanglantées. Et les cris qui ricochaient contre les parois de la caverne.

Pris de panique, Erwin attrapa le poignet d’Alexis.

"C’est ma mère ! Elle est quelque part, on doit l’aider !"

Contrôlé par la peur et l’urgence, il entraîna la fille d’Arès vers la provenance de la voix.

Poppy ? Alexis se figea, des sueurs froides dans le dos. Une partie d'elle-même voulait hurler dans la direction de la voix mais elle était comme paralysée, comme si la bave du précédent monstre dégoulinait toujours de son bras. Puis la main d'Erwin se glissa dans la sienne et Alexis s'ancra de nouveau dans cette réalité. Elle avait envie de hurler Poppy mais les mots d'Erwin résonnèrent dans son esprit. C’est ma mère ! Elle est quelque part, on doit l’aider. Puis la voix de Léo hurlant le nom de Caly s'ajouta à ça. Alexis se stoppa brusquement, arrêtant Erwin dans sa course.

« ARRÊTEZ. »

Sa voix, forte, assurée, ricocha contre les parois de la grotte. La voix de Poppy se tut quelques instants alors que les yeux de ses camarades étaient braqués sur elle.

« C'est une illusion. Une illusion. Une illusion très réaliste. »

Trop réaliste.