« C’est gentil, mais… je ne voudrais pas déranger ta tante pour ça. Ce n’est pas définitif en vrai. »

Au début, Ava n’allait pas insister. Pour peu que sa tante se retrouver à adopter Niamh en même temps que Clayton, Ava ne connaîtrait plus jamais un moment de répit. Mais…

« Je peux supporter les remarques et les commentaires familiaux pendant les prochaines semaines… ça ne va pas me tuer. »

Ava soupira. Niamh était peut-être bonne légionnaire mais elle était piètre menteuse. La grimace, la gestuelle, tout hurlait à appel à l’aide qu’elle lançait probablement aux dieux. À quoi bon attendre les croulants sur leurs trônes quand Ava pouvait offrir une solution ? Après quelques négociations supplémentaires, Ava traîna Niamh jusqu’à chez elle où sa tante les accueillit chaleureusement sans faire un seul commentaire qui aurait pu mettre Ava ou Niamh mal à l’aise. Au lieu de ça, elle fouilla dans ses affaires pour en ressortir une crème pendant que Niamh buvait le café offert quelques minutes plus tôt.

« Avec ça, ta peau devrait retrouver sa couleur naturelle d’ici quelques heures. Tu auras toujours mal pendant un ou deux jours mais ça passera aussi plus vite. »

Elayne en profita pour glisser une deuxième crème dans les mains de Niamh et murmura quelque chose à propos d’un bronzage plus rapide. Ava leva les yeux au ciel. Il fallait toujours que sa tante refile ses créations à droite à gauche. Pourquoi n’ouvrirait-elle pas directement un commerce ? Nul ne le sait. Je n’ai pas le temps, répétait-elle comme si son planning était surchargé.

Une fois Elayne disparut, Ava regarda Niamh siroter… un troisième café ? Fronçant les sourcils, Ava pointa la boisson du menton :

« Pas intérêt d’avoir une crise cardiaque ici, tout le monde va m’accuser. »

Théa m’avait déjà parlé de la tante d’Ava. La réalité était encore plus adorable que ce qu’elle m’avait raconté.
Même Ava me semblait moins rugueuse en présence d’Elayne. Cette femme avait une aura incroyable. À la fois maman-poule, à la fois sorcière un peu allumée, mais toujours d’une extrême bienveillance. Tu m’étonnes que Clayton passait sa meilleure vie ici, si elle traitait tout le monde comme cela.
D’un autre côté, le caractère revêche de la centurion en devenait presque attendrissant dans ce contexte. J’oubliais trop souvent que j’étais plus amie avec des jeunes que des vieux et que dans ce groupe de potes, c’était pratiquement que des ados plus ou moins sortis de leurs crises. Peut-être qu’Ava était une fleur de fin de saison et qu’elle avait encore un peu besoin de prouver au reste de l’univers qu’elle était une dure à cuire super rebelle et non pas la digne héritière adorable de sa tante. C’était mignon. Bon, après, je parlais comme si j’avais soixante ans, mais j’en avais à peine cinq de plus qu’eux.

C’était tellement trop de gentillesse que j’avais l’impression d’être un éléphant dans un magasin de porcelaine. C’est-à-dire, parfaitement dans mon élément. Tout était négociation. Accepter un nouveau café, un compliment, un conseil, un remède. Si quelques minutes plutôt je m’imaginais déjà passer le mois d’août le plus long de mon existence entre remarques passives-agressives et commentaires redondants et déplacés, mon problème me semblait parfaitement ridicule maintenant sous le sourire et les petits soins d’Elayne. Je devais sûrement passer pour une gamine trop coquette, douillette, obsédée par son apparence…

C’est pourquoi je m’étais sentie coupable d’être soulagée lorsqu’Elayne avait quitté le salon. Le silence était revenu. Ainsi que le bourdonnement de mes pensées.

« Pas intérêt d’avoir une crise cardiaque ici, tout le monde va m’accuser. »

« Mince. Je pensais que mon plan pour ruiner ta réputation était parfait. Je vais être obligée de dire à tout le monde à quel point tu es sympa en vrai. » avais-je répondu le sourire dans les yeux et noyé dans une nouvelle gorgée de ma boisson divine.

« Mince. Je pensais que mon plan pour ruiner ta réputation était parfait. Je vais être obligée de dire à tout le monde à quel point tu es sympa en vrai. »

Ava pouffa. Premier degré. Sincèrement. Elle pouffa de rire. Si Clayton avait été là, il en aurait fait tout un foin et rien que pour ça, Ava se racla la gorge pour essayer de retrouver constance. C’était la fatigue qui avait abaissé ses barrières, rien d’autre.

« N’exagérons rien, ils risquent d’être déçus de découvrir la réalité. »

Ava se servi un ice tea qu’elle bu à la paille pour oublier son instant d’égarement. Plutôt mourir que d’accepter le fait que, finalement, ce n’était pas si pire. Ce n’était pas si terrible de se laisser aller. Que Niamh n’était pas de si mauvaise compagnie. Si on oubliait ses fréquentations habituelles (la première cohorte). Non, Ava ne préférait pas réfléchir aux implications si elle acceptait cette réalité. Septembre finirait par arriver et tout serait bizarre si Ava s’avouer qu’elle s’entendait bien avec Niamh.