Ava, solo

Ava contemplait l’océan. Pour la première fois depuis son séjour au Club Mydh, elle songea à aller son baigner. Après tout, elle portait tous les jours un maillot de bain sous ses habits, il était peut-être temps de l’utiliser ? La Centurion soupira. Non, l’envie ne manquait pas, mais le courage ? La force ? De marcher jusqu’aux vagues ? De se déplacer en plein soleil ? Pour quelles raisons ? S’assoir dans l’eau et repartir ? Non, elle n’avait définitivement ni le courage, ni la force d’écouter ses envies.

« Tiens, tiens, tiens, mais qui voilà ? »

Le sang d’Ava ne fit qu’un tour. Une nouvelle envie remplaça la précédente : celle de fuir, de s’en aller en courant. Pourtant, son visage maintenait son masque de neutralité lorsqu’elle tourna la tête vers son interlocutrice.

« Dire bonjour t’arracherait la bouche ? Je mérite au moins ça. Ta tante a vraiment décidé d’alterer toute mon éducation, c’est ça ? »

Ava resta de marbre, le cœur battait follement. Un tic nerveux fit trembler les lèvres de sa mère. Ava sentait que le dragon allait surgir d’une minute à l’autre. Elle avait beau s’être endurcie, il suffisait que sa mère apparaisse pour qu’Ava se sente comme une enfant apeurée.

« Ce que tu fais avec tes cheveux, c’est vraiment moche. Le bleu, vraiment ? Ça ne ressemble pas à l’enfant que j’ai élevé. »

Ava fronça les sourcils.

« Cette robe, vraiment ? Ça ne ressemble pas à la mère que j’ai connue de porter des vêtements qui la grossissent. »

Ava vit sa mère lever la main et l’arrêta juste avant de se prendre une gifle. L’adrénaline effaçait la peur au profit d’une colère maîtrisée.

« La fille que tu as élevée est morte quand tu as cessé de la considérer comme une enfant. »

Ava serra si fort le poignet de sa mère que ses phallanges devinrent blanches. L’ancienne légionnaire ne ploya pas, affutant sa langue de vipère pour frapper là où elle était sûre de toucher. Pour autant, avant que sa mère ne puisse parler, une main rassurante se posa sur l’épaule d’Ava qui lâcha alors sa mère.

« Je croyais que notre accord était clair, Aurore.
— Celui où je te laisse kidnapper ma fille sans me plaindre ?
— Celui où tu arrêtes de considérer les autres comme des objets pour ton ambition malsaine. Tu. N’es. Pas. Maman. »

Ava recula lentement. À mesure qu’elle parlait, sa tante poussait Ava en arrière. « Je m’en occupe, va-t-en », semblait-elle dire. Ava n’allait pas se faire prier. L’adrénaline était redescendue, Ava tremblait de partout. Elle n’avait qu’une envie : se réfugier au fin fond de la forêt et ne plus jamais en ressortir. Ou aller au milieu de l’océan et se laisser engloutir par les vagues. Choisissait la première option, Ava quitte la plage et se dirigea vers les bois. Une fois certaine d’être seule au monde, la Centurion se laissa glisser le long d’un arbre et enfouit sa tête dans ses genoux.

Inspiration.
Expiration.
Inspiration.
Expiration.

La prochaine fois qu’elle verrait Priam, peut-être Ava songerait-elle à lui demander des cours contre les humains plutôt que les monstres.