Alexis était assise sur une branche, à quelques mètres du sol. Les jambes ballantes dans le vide, elle fixait droit devant elle. Le lac du Camp Jupiter s’étendait devant ses yeux, immobile, presque illusoire sous cette chaleur étouffante du mois d’août. Alexis soupira. Combien de temps allait-elle encore attendre ici ? Elle roula des yeux. C’était stupide. Elle aurait dû être au frais, dans son baraquement, avec sa cohorte – même si elle ne pouvait pas en blairer la moitié. À vrai dire, même faire la conversation cette niaise de Raemilia aurait été plus agréable que d’attendre sous cette chaleur. Alexis laissa échapper un soupir. Qu’est-ce qu’il ne faut pas faire pour gagner la confiance des Chimères !

Cela faisait maintenant quelques années qu’Alexis était arrivée au Camp Jupiter. Elle avait été revendiquée assez rapidement par Mars. C’était une divinité hautement respectée par les sang-mêlés d’ici et personne ne semblait accepter cette réalité : Alexis, cette gamine des rues, malpolie, agressive et hautaine, était la fille du dieu de la guerre ! Mais peut-être que tout cela aurait pu passer si seulement elle faisait des efforts lors d’entraînements… Mais non. Alexis n’en avait rien à foutre des entraînements. Ses pouvoirs lui donnaient l’impression d’être invincible alors à quoi bon s’épuiser ! Sa peau était quasiment impossible à blesser et elle pouvait maudire les armes de ses ennemis. Les entraînements tournaient vite en « Oh, zut. Ton épée a l’air si lourde. On va devoir reporter cet entraînement quand tu auras la force de la porter ! À la prochaine. »

Au bout d’un moment, Alexis apprit à l’existence des Chimères. Ça lui rappelait un peu les différentes personnes qu’elle avait rencontré dans les foyers de son enfance, alors elle voulait vraiment en faire partie. Elle avait alors retourné tout le Camp pour rencontrer le leader et avait fini par tomber sur Seraphina, la centurion de sa propre cohorte. Pas la personne qu’Alexis aurait pensé trouver à la tête d’un gang, mais soit. Alexis finit par être acceptée par les Chimères à la suite d’un vote, mais elle ne semblait jamais avoir la confiance des autres. Elle était trop instable, trop impulsive. Personne ne semblait réussir à la contenir et cela avait eu raison de la non-confiance des autres en elle.

Je suis quelqu’un de confiance. Je suis douée ! Je suis forte ! Laissez-moi vous faire vos preuves. Cette phrase résonnait encore dans la tête d’Alexis alors que le soleil, reflétant dans ce lac immobile, l’aveuglait. Pourquoi fallait-il qu’elle eût l’air si implorante ? Elle aurait dû avoir l’air sûre d’elle. Mais elle ne l’avait pas été. Ce fut donc avec un sourire plus que mauvais que Seraphina lui avait imposé d’aller voler l’arme du centurion de la deuxième cohorte. Quelle idée. De merde. S’il y avait bien quelqu’un qu’Alexis ne pouvait pas blairer, c’était lui. Tout chez lui l’agaçait. Son sourire. Ses muscles. Son attitude. Beurk. Mais au moins, elle connaissait par cœur son emploi du temps et ses habitudes. Comme ça, elle était sûre de l’éviter la plupart du temps. Enfin. Sauf aujourd’hui. C’était donc pour cette raison qu’elle était assise sur cette branche, en train de fixer ce lac que cet abruti de Centurion aimait tant.

Au bout d’une heure à attendre, Alexis était abattue. Pourquoi n’avait-il pas décidé de venir aujourd’hui ? Il venait tout le temps pour se baigner dans cette eau stagnante. Alexis, incapable de rester immobile pendant encore plus longtemps, se laissa tomber en arrière. La tête en bas, maintenue dans cet arbre grâce à la seule force de ses jambes, Alexis se retrouva face à face avec… le fameux centurion. Essayant de cacher sa surprise, Alexis afficha une mine qui se voulait mesquine.

« Oh. Salut Erwin. »

La journée avait été chargée pour Erwin, pleine de combats variés, d'entraînements contre différents Romains. Une journée comme la plupart de celles qui s'étaient écoulées depuis l'arrivée du jeune fils de Neptune au camp Jupiter. Dès ses premiers jours à la Nouvelle Rome, il avait pris goût aux jeux de guerre et au maniement de son arme, un gladius à l'allure simple et légère. Le programme rigoureux qu'il suivait chaque matin ne lui laissait pas de temps pour s'ennuyer, et ça lui plaisait. Il avait besoin de bouger et s'en donnait à coeur joie dès qu'il s'agissait de s'améliorer physiquement.

Comme si l'honneur de faire partie de la deuxième cohorte ne suffisait pas, tous ces entraînements durement suivis avaient fini par mener Erwin au poste de centurion. Au début, ce fut pour le demi-dieu un synonyme de nouvelles responsabilités et d'attentes plus poussées de la part des légionnaires. Mais le temps avait effacé ces troubles et le fils de Neptune se sentait à présent parfaitement à sa place, continuant à suivre sa routine comme si rien n'avait changé.

Dans cette routine, la soirée après l'entraînement était dédiée à une séance de natation dans le lac. Rien de mieux pour un digne descendant de Neptune cherchant à entretenir sa forme autrement qu'en frappant un adversaire. Nager détendait ses muscles petit à petit. Son esprit se calmait également lorsqu'il n'y avait plus que l'eau autour de lui. Et puis surtout, nager était une bonne façon de se mettre en appétit avant le repas du soir, et Erwin tenait à profiter de ce moment.

Ce soir-là, Erwin marchait donc en direction du lac. Il faisait beau, le soleil était encore haut dans le ciel, mais diffusait ses rayons de fin de journée, tapant comme au cours des derniers jours. C'était un temps parfait pour se rafraîchir dans l'eau. Erwin adorait ça. Alors qu'il profitait de la lumière sur son visage, une branche craqua au-dessus de lui et une masse de cheveux s'écroula juste devant son visage.

"Oh. Salut Erwin."

"Salut Alexis. Tu t'es perdue ?"

Il n'y avait qu'un petit écart chronologique entre les arrivées d'Erwin et d'Alexis au camp. Si cela les avait liés dans un premier temps, ils avaient pris des chemins différents, Erwin se concentrant sur ses entraînements, Alexis sur... Sur quoi, au juste ? Le fils de Neptune s'était toujours demandé ce qui avait écarté son amie de lui, mais elle avait commencé à négliger son programme, à moins se montrer sur le terrain d'entraînement, à avoir une réputation un peu douteuse. Désormais, Erwin la voyait beaucoup moins, il fut donc surpris de la voir suspendue d'une manière peu confortable à un arbre. Il appuya sur le ventre découvert de la jeune fille, un air taquin sur le visage.

"Tu comptes t'exhiber comme ça pendant combien de temps, sinon ?"

Quand Alexis est arrivé au Camp Jupiter, tout avait été assez confus. Elle avait finalement trouvé du réconfort malgré elle auprès d’Erwin. Comme elle, il cherchait encore une façon de faire ses marques et, souvent, ils se sont retrouvés à parler pendant longtemps de tout et de rien. Il y avait cependant des différences notables entre eux, ce qui a fini par faire fuir Alexis. Erwin avait tout du mec parfait, ce qui avait tendance à énerver la fille de Mars. Dans un premier temps, qui débarque au Camp Jupiter et se retrouve directement dans la deuxième cohorte ? Ok, le mec qui est arrivé au Camp Jupiter avec une tête de minotaure dans ses mains. Soit. Alexis était arrivé avec un paquet de chips volé dans la rue d’en bas. Soit. C’était sûrement la différence de trop.

Salut Alexis. Tu t’es perdue ? Même d’un autre angle, il était beau. À croire qu’il devait absolument réussir dans tous les domaines. Son seul défaut notable était son ascendance : Neptune était vraiment une divinité de merde. Mais Erwin avait quand même réussi à s’élever parmi les meilleurs alors qu’Alexis se contentait du bas de l’échelle. Ce fut sûrement dans l’optique de compenser cette différence qu’en réponse à sa question, Alexis se contenta de répéter ce qu’il venait de dire en marmonnant et en levant les yeux au ciel - enfin, au sol vu sa position. Son attitude fut complètement ignorée par Erwin qui se contenta d’appuyer sur le ventre découvert d’Alexis. Tu comptes t’exhiber comme ça pendant combien de temps, sinon ?

« Autant de temps que j’ai envie, finalement. »

Alexis le fixait avec un air de défi et chassa sa main de son ventre d’une petite tape. Le sang commençait à lui monter grandement à la tête, ce qui lui donnait légèrement le tournis. De plus, maintenant qu’elle se rendait compte qu’Erwin ne la lâchait pas des yeux, elle se sentait gênée. Pourquoi n’était-elle pas restée immobile là-haut ? Finalement, après seulement quelques secondes de silence, Alexis se redressa mollement sur la branche puis sauta dans le vide. Sa réception fut parfaite, si on omet le détail que sa cheville droite ne l’avait pas du tout aimée. Trop fière pour l’admettre, Alexis ignora la douleur qui aurait pu lui arracher une grimace et garda une expression toujours aussi hautaine.

« J’allais justement… faire des trucs. Alors, tu peux disposer. »

D’un mouvement rapide du poignet, la jeune fille lui indiqua qu’il pouvait partir. Néanmoins, elle ne bougea pas d’un seul centimètre, se contentant de s’appuyer contre le tronc de l’arbre pour soulager sa cheville douloureuse. Elle détourna le regard d’Erwin pour fixer un point au loin, espérant qu’il allait faire sa vie et qu’elle pourrait tranquillement lui prendre son arme.

Alexis faisait la moue, elle fusillait faussement Erwin du regard. Elle écarta sa main de son ventre, l'air indigné. Ses joues commençant à devenir rouges lui donnait l'air plus fâché qu'elle ne l'était réellement. Ce petit jeu de fierté fit sourire le fils de Neptune. Alexis avait son petit caractère, mais il savait qu'elle n'était tout de même pas si méchante. Si ça avait été le cas, elle n'aurait pas manqué une occasion pour le poignarder... Alors il ne se gênait pas pour la taquiner.

Finalement, Alexis se redressa pour descendre de son arbre les pieds vers le bas. Erwin attendit patiemment qu'elle saute de sa branche. Lorsque la fille de Mars se planta devant lui, son air digne contrasta d'une manière ironique avec ses cheveux décoiffés et son t-shirt encore tout plié. Mais elle ne sembla pas y faire attention. Elle s'appuya dédaigneusement contre le tronc de l'arbre pour dire d'un air de diva :

"J’allais justement… faire des trucs. Alors, tu peux disposer."

Erwin se mit à rire et arqua un sourcil. Alexis avait vraiment prévu de "faire des trucs" ? En restant assise en haut d'un arbre ? Elle avait dû trouver cette occupation suffisamment amusante pour faire un détour avant de "faire des trucs". Et puis, bien qu'Erwin n'ait pas croisé la fille de Mars très souvent depuis un moment, il n'avait jamais entendu dire qu'elle avait des choses très importantes à faire. Lorsqu'il entendait parler d'elle, il s'agissait plutôt de mauvais plans ou d'histoires relativement foireuses...

"Désolé, je ne compte pas 'disposer', je suis là pour nager."

Le fils de Neptune ponctua ces mots de quelques pas vers le bord du lac. Il enleva son t-shirt, dévoilant les muscles que ses séances d'entraînement avaient finement taillés depuis son arrivée au camp. Alexis ne bougeait pas, elle avait les bras croisés sur la poitrine, d'un air fermé.

"Mais vas-y, va faire tes trucs !  Le lac est assez grand pour tout le monde."

L'idée de dérouiller un peu les muscles d'Alexis, qui fuyait pas mal d'entraînements pour faire on-ne-sait-quoi, germa dans l'esprit d'Erwin. D'un air provocateur, il fit signe à Alexis.

"Mais si ce que t'as à faire peut attendre, viens te baigner. Après tout, t'avais pas l'air très pressée de 'faire des trucs'..."

Sur ce, le demi-dieu enleva son pantalon qu'il abandonna sur la rive avec son t-shirt, son gladius posé à moitié dans l'eau, et avança dans l'eau jusqu'à ce que les petites vagues lui arrivent à mi-cuisse. Il attendit la réaction d'Alexis.

Désolé, je ne compte pas ‘disposer’, je suis là pour nager. Alexis se concentrait très fort sur ce point invisible au loin. Elle ferma complètement son visage, essayant d’ignorer complètement le fils de Neptune. Si elle le fixait, elle allait faire apparaître un sourire vicieux en répondant « C’est le but », ce qui aurait fait complètement foirer son plan pourtant si méticuleux. Alors elle continuait de fixer ce point invisible, immobile, respirant à peine. Tout était parfaitement calculé. Alexis n’allait pas échouer, les Chimères l’accepteraient enfin et elle pourra enfin compter sur d’autres personnes dans sa vie. C’était parfait ! Et ce n’était pas un fils de Neptune qui allait tout faire rater.

Quelque chose sur la droite interpella l’œil pourtant concentré d’Alexis. Lentement, elle détourna le regard pour voir qu’Erwin était en train de se déshabiller. Pendant une seconde, la mission d’Alexis avait complètement disparu de son esprit. Elle se contentait de fixer le corps du fils de Neptune comme s’il n’y avait plus rien d’autre sur terre ça. Quelques secondes de plus, et Alexis aurait été en train de baver. À contre-cœur, elle détourna le regard juste avant qu’Erwin ne la remarque. Les sourcils froncés, elle fixait maintenant une branche sur l’arbre d’en face, agacée par sa propre déconcentration.

Mais vas-y, va faire tes trucs ! Le lac est assez grand pour tout le monde. Alexis ignora Erwin. Elle ne détourna pas son regard. Elle ne parla pas. Elle avait une mission. Une mission de la plus haute importance. Elle n’avait pas le temps de jouer aux jeux stupides d’Erwin. Même si à une époque elle les avait adorés, elle n’avait plus le temps pour s’y consacrer. Alors Alexis analysa plus en détails cette superbe branche qui frémissait au vent. À cause de la chaleur, certaines feuilles étaient légèrement brûlées, c’était fasci…

Mais si ce que t’as à faire peut attendre, viens te baigner. Après tout, t’avais pas l’air très pressée de ‘faire des trucs’… Cette fois, le ton employé par Erwin eût raison d’Alexis qui laissa couler son regard vers lui. Elle ne fut pas déçue du voyage car il décida d’enlever son pantalon à ce moment, ce qu’Alexis ne loupa pas d’une miette. Puis, il l’abandonna près de son t-shirt… et de son arme ! La mission, Alexis. La mission. Erwin s’enfonça lentement dans l’eau, le regard fier, provocateur. Il s’arrêta quand l’eau fut à mi-cuisse. Alexis se décolla alors de son arbre et s’approcha de l’eau.

« Ça a l’air super, sauf que j’aime pas tellement l’eau, tu vois… »

Alexis avait une voix distraite, mais elle avait réussi à garder la tête haute, fixant Erwin qui se trouvait à quelques mètres. Elle s’avança encore un peu, évitant soigneusement de se faire mouiller les pieds.

« Les romains sont pas trop branchés ‘eau’ en général. Tu es bien le seul truc que Neptune ait réussi. »

D’un pas sur le côté, Alexis s’approcha des affaires d’Erwin.

« Enfin, du point de vue des romains. Pas du mien. »

Alexis resta immobile un instant, le regard perdu dans le vague. Erwin était immobile, sûrement en train de se demander ce qu’elle foutait. Finalement, d’un geste assez rapide, elle se pencha, attrapa le gladius d’Erwin et fit quelques pas en arrière, un sourire charmant sur les lèvres.

« Je vais t’emprunter ça du coup, salut ! »

Puis elle fit demi-tour, s’apprêtant à courir comme jamais.

Alexis jeta un oeil vers le lac avant de répondre qu'elle n'avait pas vraiment envie de s'y plonger. Elle s'approcha néanmoins de quelques pas, comme si l'onde reflétant le soleil l'attirait malgré elle. Erwin se dit qu'elle finirait bien par craquer et venir se baigner tôt ou tard, quitte à barboter là où l'eau n'était pas encore trop profonde.

"Les romains sont pas trop branchés 'eau' en général. Tu es bien le seul truc que Neptune ait réussi."

Le demi-dieu prit un air étonné. Est-ce que c'était un compliment, ou pas vraiment ? Toujours était-il que, effectivement, Neptune n'avait pas raté son fils pour le coup. Quand on possédait des pouvoirs liés à l'eau, c'était une bonne chose d'aimer cet élément. Aucun Romain n'aimait autant se prélasser dans les bains, regarder les flaques au sol durant les jours de pluie, pratiquer une séance quotidienne de natation par presque tous les temps... Mais Erwin n'avait pas attendu d'arriver à la Nouvelle Rome pour apprécier l'eau, ses habitudes au camp ne lui semblaient donc pas particulièrement étranges.

"Enfin, du point de vue des romains. Pas du mien."

Cette fois, Erwin posa les mains sur ses hanches et leva les yeux au ciel. Alexis se considérait-elle comme une non-romaine ? Ses mots semblaient assez contradictoires et sonnaient comme une vague excuse. Le même ton que lorsqu'elle avait déclaré devoir "faire des trucs". Le fils de Neptune n'y croyait pas. Alors qu'il allait railler Alexis et l'encourager soit à courir faire ce qu'elle devait faire, soit à le rejoindre, la fille de Mars se pencha et attrapa l'arme qu'il avait laissé à moitié dans le lac.

"Je vais t’emprunter ça du coup, salut !"

Erwin allait protester et se lancer sur elle lorsqu'il la vit se mettre à courir. Le sprint dura environ vingt-deux secondes avant qu'Alexis ne ralentisse et que son allure se rapproche plus de la marche. Erwin la voyait toujours près de l'eau. Il la distinguait encore lorsqu'elle s'arrêta et se plia en deux, dans la posture de quelqu'un qui fait une crise d'asthme. Alors le Romain fit quelques pas vers elle, toujours dans l'eau. Alexis se redressa, comme alertée par ce mouvement, et fit quelques pas hasardeux tout en fixant le propriétaire du gladius.

A ne pas regarder où elle mettait les pieds, elle finit par marcher dans l'eau. Erwin ne manqua pas cette occasion. La surface du lac se durcit autour de la chaussure d'Alexis. Elle tenta de se libérer en tirant sur sa cheville, rien n'y fit. Erwin arriva en nageant à son aise et s'arrêta à deux mètres d'elle. Il la fixa sans rien dire et laissa seulement voir dans son regard qu'il la jugeait légèrement. La fille de Mars ouvrit la bouche, comme pour commencer une explication.

"Tu devrais fermer la bouche et inspirer bien fort."

Alexis ne sembla pas comprendre. Un instant après, l'eau qui entourait son pied fusa droit vers Erwin, tirant la Romaine avec elle. Le fils de Neptune releva Alexis, désormais trempée, les cheveux décorés de quelques petites algues, et en plein milieu de l'eau, près de lui. Il sortit une main du lac et la tendit devant Alexis.

"Des trucs à faire... Chercher les ennuis en fait partie ? Aller, rends-moi ça."

Le demi-dieu souriait. La prestation d'Alexis avait été quelque peu lamentable, elle ne s'y était clairement pas prise de la bonne façon pour dérober cette arme. Et quelle idée, d'ailleurs ! Erwin la regardait, amusé malgré tout. Il attendait qu'elle lui rende ce qui lui appartenait. Il ne la touchait pas : inutile, l'eau se resserrerait comme un étau autour d'elle si elle cherchait encore à s'enfuir. Et encore, ce n'était pas une mesure nécessaire. Erwin l'aurait battue à plate couture à la nage : il aimait nager, il était plus entraîné, et il n'avait pas de vêtements pour l'entraver dans l'eau.

Qu’est ce qu’il lui avait pris de se mettre à courir ? Bien qu’elle ait réussi, par le plus grand des miracles, à avoir quelques muscles, Alexis n’avait jamais travaillé ni son cardio, ni son endurance. Ainsi, au bout de quelques secondes de sprint lamentable, la fille de Mars s’arrêta pour reprendre son souffle. Dans ses fantasmes les plus fous, elle avait déjà parcouru la moitié du Camp Jupiter et Erwin était de hors vue. Dans la réalité, elle était toujours à quelques mètres du lac – ce qui était une très mauvaise trajectoire de course quand on veut éviter un enfant de Neptune – et en plus elle pouvait sentir le regard d’Erwin sur elle. Ce fut d’ailleurs à ce moment qu’elle entendit un mouvement dans l’eau, ce qui lui fit faire un bond en arrière.

Erwin arriva à ce moment là dans son champ de vision, l’air plus las que réellement agacé – ce qui était d’autant plus agaçant. Alexis allait trouver une excuse de type « ahaha, c’était une blague, je te rends ton arme et je m’en vais » pour finalement ne pas lui rendre et courir loin de ce lac. Malheureusement pour elle, sa jambe était coincée dans l’eau. Alexis avait beau essayé de tirer dans tous les sens, son pied refusait obstinément de se défaire de la surface aqueuse. Puis, Erwin lui cloua définitivement la parole alors qu’elle venait d’ouvrir la bouche pour râler. Tu devrais fermer la bouche et inspirer bien fort. Outrée qu’il la fasse taire de la sorte, Alexis ne prit aucune inspiration. Elle ouvrit uniquement la bouche pour se foutre de la gueule d’Erwin, mais malheureusement sa voix se noya avec le reste de son corps.

Pendant quelques secondes, Alexis eut l’impression d’être dans une machine à laver. Ou dans une chasse d’eau. Puisqu’elle n’a réellement testé aucun des deux, elle ne pouvait pas trancher. Néanmoins, la réalité était là : elle se fit complètement aspirer par une force inconnue. Elle se fit ensevelir sous une montagne d’eau. Pour finir, sa tête frotta contre différentes surfaces allant du sable à des vieilles algues dégueulasses. Enfin, elle put sortir la tête de l’eau, suffoquant complètement d’avoir été en apnée pendant aussi longtemps. Le temps d’analyser son environnement, Erwin était déjà une main tendue devant elle, réclamant son précieux. Des trucs à faire… Chercher des ennuis en fait partie ? Aller, rends-moi ça.

Alexis sortit une main de l’eau, levant un doigt en l’air, comme pour dire « attends deux secondes ». Elle continua de suffoquer pendant quelques secondes, toussant de temps en temps pour cracher de l’eau qui s’était infiltrée dans ses sinus, maintenant toujours fermement le gladius d’Erwin dans son autre main, dans son dos. Puis, elle analysa son environnement : elle était au moins à trois mètres du rivage, Erwin lui bloquant le passage, elle avait de l’eau jusqu’à la poitrine, et était complètement habillée. Le seul point positif était qu’elle était au moins rafraichie. Un autre point positif était évidement les pectoraux d’Erwin mais Alexis n’avait pas le temps de les admirer car dès qu’elle eût retrouver son souffle, elle fusilla Erwin du regard.

« Non. »

Elle aurait pu s’arrêter là. Assumer ses choix. Être forte. Mais non, Alexis ne s’arrêta pas là. Elle ne laissa pas le temps à Erwin de dire quoique ce soit, ignorant l’eau qui se faisant pressante contre elle.

« T’en as pas besoin, j’en ai besoin. Va t’en faire faire une autre sur-mesure. En un battement de cil, tu as tout ce que tu veux ! Fais pas chier pour un gladius qui n’a rien de personnel. »

Alexis, tenant toujours fermement le gladius dans sa main contourna Erwin, ne lui tournant jamais le dos. Elle marchait à deux à l’heure, s’empêtrant dans ces propres mouvements. Finalement, elle n’eût même pas fait trente centimètres que la rage lui fit monter les larmes aux yeux.

« Pourquoi t’es chiant, pourquoi ce lac de merde existe, je te déteste toi et tes pouvoirs de merde. »

Alexis avait juste l’air pathétique. Elle mettait des coups dans l’eau comme si arroser Erwin allait changer quoique ce soit à sa situation personnelle. Au moins, si les larmes coulaient sur son visage, elle pourrait juste accuser l’eau qu’elle avait partout. La frustration était finalement le plus gros problème d’Alexis.

Alexis avait l'air complètement retournée après son passage express au fond du lac. Erwin rapprocha sa main, un peu insistant, tandis qu'elle entreprenait de se vider de toute l'eau qu'elle avait ingurgitée. De toute évidence, elle n'avait pas pris en considération l'avertissement du fils de Neptune et avait gardé la bouche ouverte. Pas très judicieux. Lorsqu'elle eut recraché la plus grande quantité de liquide qu'elle le pouvait, Alexis adressa à Erwin un regard furieux.

"Non."

Erwin fut surpris. Qu'est-ce qu'elle voulait faire avec son gladius. Si elle voulait juste l'ennuyer, ça n'en valait pas la peine, et si c'était pour autre chose... Quelle était cette chose, cette raison mystérieuse ? Le fils de Neptune l'aurait bien demandé, mais Alexis s'emporta sans qu'il comprenne, ne lui laissant pas le temps de dire un mot.

"T'en as pas besoin, j'en ai besoin. Va t'en faire faire une autre sur mesure. En un battement de cils, tu as tout ce que tu veux ! Fais pas chier pour un gladius qui n'a rien de personnel."

Rien de personnel, c'était très relatif. Enfin il fallait bien admettre qu'Erwin s'était déjà attaché à d'autres objets d'une manière bien plus importante. S'il tenait à récupérer son arme, c'était surtout pour la forme. Comme l'avait dit Alexis, avec un peu trop d'amertume cependant, le demi-dieu pouvait parfaitement se faire confectionner une nouvelle lame, plus belle, plus légère s'il le voulait. De son côté, peut-être que la fille de Mars avait perdu son arme personnelle et ne pouvait pas en trouver une autre. Elle reculait, trempée, l'arme volée cachée dans son dos.

"Alexis..."

Les mots qui devaient suivre se perdirent dans le vent. Alexis s'énerva. Erwin ne comprit pas pourquoi. Il ne se souvenait pas de l'avoir connue si énervée à ses côtés.

"Pourquoi t'es chiant, pourquoi ce lac de merde existe, je te déteste toi et tes pouvoirs de merde."

La Romaine frappait rageusement l'eau, comme si elle y donnait des coups d'épée. Erwin se faisait asperger par ce chahut, mais il n'y prêtait pas attention. Qu'est-ce qu'il avait fait ? Pourquoi Alexis le détestait ? Depuis tout ce temps écoulé, depuis qu'ils s'étaient perdus de vue, le fils de Neptune ne pensait pas que leur ancienne amitié, qu'il considérait toujours d'actualité, avait tant changé. Il appréciait toujours Alexis, et elle le détestait. Il n'avait pas le coeur de lui courir après pour récupérer un simple gladius. Des souvenirs lui revenaient et lui semblaient loin.

"Alexis, s'il te plaît, viens."

La fille de Mars ne bougea pas, le regard dur, le visage fermé malgré le ton doux qu'Erwin avait employé. Le demi-dieu attendit un instant. Aucun mouvement, d'un côté comme de l'autre. Alors il se rapprocha d'Alexis, durcissant l'eau autour d'elle pour qu'elle ne s'en aille pas. Elle tremblait légèrement, elle avait sans doute froid, à rester immobile. Erwin se rapprocha. Se rapprocha encore. La fille de Mars ne bougeait pas, et pourtant, le centurion avait relâché son pouvoir.

"Si tu avais besoin de cette arme, tu pouvais juste me le demander. Je te l'aurais laissée, j'ai pas oublié qu'on était amis."

Attirant l'eau vers lui d'un seul coup, Erwin rapprocha Alexis de lui grâce à une petite vague. Elle était face à lui, évitant de le regarder. Il aurait pu lui reprendre le gladius d'une seule main s'il l'avait voulu, mais il n'en fit rien. Il ne faisait plus attention à ça. Une seule question lui brûlait les lèvres.

"Alors pourquoi tu me détestes ?"

Alexis avait envie de hurler à s’en arracher les cordes vocales. Elle avait envie de tout voir exploser sous ses yeux, de voir le chaos de déchaîner dans tout le Camp Jupiter. Pourquoi ne pouvait-elle pas faire ça ? Parfois, quand ses émotions devenaient trop étouffantes, Alexis s’imaginait qu’elle pouvait canaliser tout dans un chaos contrôlé ; elle ferait alors tout exploser autour d’elle. Au lieu de ça, elle était obligée de tout garder au fond d’elle, menaçant de se faire exploser elle-même. Souvent, elle se retrouvait à pleurer – ce qui était beaucoup moins stylé que faire tout exploser autour de soi. À cet instant précis, Alexis s’imaginait pouvoir s’élever et oublier ses propres sentiments, faire exploser ce lac pour qu’il n’en reste plus une seule goutte, tel un volcan au milieu d’un océan. Mais tout ce qu’elle faisait, c’était pleurer silencieusement. Pourquoi tout devait être si dur ?

Alexis, s’il te plait, viens. La voix d’Erwin pénétra l’esprit embrumé d’Alexis qui ne bougea d’un seul centimètre. Venir où ? Il n’y avait nulle part sur cette terre un endroit où Alexis se sentirait chez elle. Dès qu’elle aurait finit ses dix ans dans cette prison, elle s’enfuirait. Elle finirait sûrement par mourir dans les rues de San Francisco après seulement dix minutes car elle ne sera jamais rapide pour fuir un monstre, ni assez forte pour le tuer. Elle n’était déjà pas assez forte pour faire face à elle-même, alors un minotaure… Erwin s’approcha d’Alexis, l’arrachant à ses pensées morbides. Elle voulut faire un pas en arrière, mais elle était immobilisée dans l’eau. Pour peu, elle avait envie de rire. S’il tenait tant que ça à son gladius, elle lui rendrait. De toute façon, elle avait perdu cette guerre avant même qu’elle ne commence. Elle n’était pas digne des Chimères, elle n’était digne de personne.

Erwin se rapprocha d’elle mais Alexis refusa de le regarder. Elle tenait si fermement le gladius entre ses doigts qu’elle pouvait sentir ses jointures blanchir, ses ongles s’enfoncer dans sa paume. Elle ne sentit même pas l’eau desserrer son étreinte autour de son corps. Si tu avais besoin de cette arme, tu pouvais juste me le demander. Je te l’aurais laissée, j’ai pas oublié qu’on était amis. Alexis se mordit la langue. Il ne comprenait rien. Erwin ne comprenait rien. Elle aurait dû être capable de la lui voler. Elle aurait dû être capable de tout faire toute seule, comme elle l’avait toujours fait. Si elle lui demandait juste, tout perdait son intérêt, non ? Et puis, ils n’étaient pas amis. Erwin méritait mieux. Il méritait mieux qu’elle.

Un mouvement de l’eau attira Alexis encore plus proche d’Erwin. Pendant quelques seconde, la jeune fille se mit en apnée. Une petite partie d’elle se préparait à une nouvelle attaque. Une plus grosse partie d’elle ne savait juste pas comment réagir à cette proximité. Elle avait l’impression que l’air était chargé d’électricité, comme si la tension qu’il y avait entre eux était maintenant visible. Pour peu, la jeune fille fut surprise de ne pas voir des étincelles surgir de ses mains. Le corps d’Erwin était si proche du sien, c’en était presque magnétique. Elle avait envie de s’y approcher encore plus, de s’y fondre. Elle avait envie de le serrer dans ses bras, comme elle l’avait déjà fait auparavant, pour y retrouver la chaleur réconfortante qu’elle aimait tant.

Alors pourquoi tu me détestes ? Cette phrase fut comme un poignard dans le cœur d’Alexis. Elle eut de nouveau envie de pleurer. Elle le détestait tellement. Elle le détestait pour ce qu’il représentait, pour ce qu’il était, parce qu’il serait toujours quelque chose d’inaccessible pour elle. Elle le détestait parce qu’il y aurait toujours mieux qu’elle autour de lui, parce qu’elle ne pourrait jamais rien faire pour le combler, parce qu’elle finirait par le blesser, parce qu’elle ne saurait pas le rendre heureux. Elle le détestait tellement, lui et ses blagues, lui et ses sourires, lui et ses rires. Elle détestait la chaleur qu’il lui procurait, elle détestait le sentiment de réconfort qui faisait battre son cœur. Elle détestait tout ce qu’il était parce qu’elle ne pourrait jamais faire partie de sa vie sans le ruiner.

Finalement, Alexis releva les yeux pour croiser le regard du fils de Neptune. Elle s’attendait à voir le Erwin de d’habitude, celui avec un brin de curiosité dans les yeux et beaucoup de recul. Elle s’attendait aussi à y voir ce qu’elle avait l’habitude de voir dans le regard des gens qui la côtoyaient : un léger désintérêt, beaucoup de déception. Mais les yeux d’Erwin ne renvoyaient rien de tout ça. Il semblait réellement blessé, comme s’il pensait sincèrement qu’ils étaient amis et qu’elle venait de lui briser le cœur. Alors, honteuse, Alexis baissa de nouveau les yeux. Finalement, peu importe ses choix, ils étaient toujours mauvais quand cela concernait Erwin. Alexis sortit sa main de l’eau et plaqua le gladius contre le torse d’Erwin – la pointe dirigée dans l’eau, la lame à plat, le manche coincé entre le torse d’Erwin et la paume de la main d’Alexis.

« J’avais pas besoin que tu me le donnes. J’avais besoin de faire mes preuves. Visiblement, ils ont raison de pas vouloir de moi. J’peux pas même pas voler un simple gladius. »

Alexis appuya légèrement sur la paume de sa main pour faire signe à Erwin de récupérer l’arme. Mais il ne fit rien, gardant ses mains le long de son corps.

« Récupère ton arme, ça sert à rien. »

Erwin ne bougeait toujours pas, laissant l’arme toujours plaquée sur son torse. Alexis savait ce qu’il voulait. Erwin ne voulait pas de son arme. Il voulait une réponse à sa question. Mais la fille de Mars n’avait pas de réponse à lui fournir, pas de réponse qui le satisferait. Alors elle fit la seule chose qu’elle savait faire, elle le blessa pour qu’il s’éloigne pour de bon :

« On est pas amis. »

Alors, de nouveau, les larmes vinrent piquer ses yeux. Elle appuya une nouvelle fois l’arme contre le torse d’Erwin. D’une voix brisée, elle rajouta :

« Tu ne mérites pas des amis pourris. »

Leurs regards se croisèrent. Erwin se mordit légèrement la lèvre. Il avait peur qu'elle réponde, qu'elle lui dise tout ce qui n'allait pas chez lui, tout ce qui faisait qu'elle n'éprouvait plus l'amitié d'avant. Il en avait peur mais il sentait qu'il en avait besoin. Il voulait comprendre ce qui avait changé. Il voulait savoir ce qu'il devait faire pour retrouver l'Alexis d'avant, celle qui riait avec lui, qui lui confiait ses peines, qui tentait de l'attaquer par surprise aux entraînements. Celle qui lui manquait.
Mais Alexis baissa les yeux et se tut.

De l'eau glissait sur ses joues. Erwin ne savait pas si c'était l'eau du lac ou des larmes. Il espérait de tout son coeur que ce ne soit pas la deuxième possibilité. Tout mais pas ça, pas Alexis en pleurs. Pas face à lui, pas à cause de lui. La fille de Mars tira l'arme de l'eau, plaqua brusquement le pommeau froid contre la peau d'Erwin. Il fixa le gladius qu'il ne reconnaissait presque plus. Tout lui semblait lointain. Même la voix d'Alexis.

"J'avais pas besoin que tu me le donnes. J'avais besoin de faire mes preuves. Visiblement, ils ont raison de pas vouloir de moi. J'peux pas même pas voler un simple gladius."

Erwin ne sut quoi dire. Sa gorge était nouée et il y avait beaucoup de choses qu'il ne comprenait pas dans cette phrase. Faire ses preuves pour quoi ? Pour qui ? Qui avait raison de ne pas vouloir d'elle ? Pourquoi avait-elle besoin de voler l'arme du fils de Neptune quand il pouvait la lui donner ? Alexis appuya sur le pommeau du gladius. Erwin le fixa, ne bougea pas. Il n'en voulait plus.

"Récupère ton arme, ça sert à rien."

Pourquoi faisait-elle ça ? Pourquoi compliquait-elle les choses alors que tout pouvait être simple ? Erwin voulait récupérer son arme, elle voulait la garder. Erwin lui donnait son arme, elle ne l'acceptait pas. Erwin lui offrait son amitié, elle l'écrasait. Erwin lui demandait ce qu'il devait faire pour se rapprocher d'elle, redevenir comme avant. Elle ne disait rien.

"On est pas amis."

Erwin déglutit difficilement, sa gorge n'était plus qu'un noeud qui se resserrait. Il avait l'impression qu'une partie du monde s'effondrait. La partie du monde sur laquelle il se trouvait, Alexis restant debout sur la terre encore intacte. Le demi-dieu ferma les yeux. Ça faisait mal, mais il ne savait pas quoi faire alors il ne bougea pas, ne dit rien et écouta simplement son coeur battre un peu trop difficilement dans sa poitrine. Puis il y eut un sanglot d'Alexis.

"Tu ne mérites pas des amis pourris."

Le centurion rouvrit les yeux. Alexis semblait effondrée. Erwin ne réfléchit pas plus longtemps. Il posa sa main sur celle de la fille de Mars, lui fit lâcher le gladius qui tomba dans l'eau, entre les deux Romains. Il ne lâcha pas cette main et, de l'autre, il rapprocha doucement la tête d'Alexis. Il rapprocha ses lèvres de son front et les y posa délicatement, sans vraiment l'embrasser. Il resta dans cette position, le nez dans ses cheveux, la main contre son coeur. Il inspira pour ne pas trembler à ce contact.

"Faire tes preuves pour quoi, à qui ? La seule chose qui est pourrie chez toi, c'est ta coiffure, là, maintenant. Et ton endurance aussi... Mais pour ce qui est d'être une amie pourrie, je me rappelle très bien que ça n'a jamais été le cas."

Puis, dans un élan peut-être un poil trop brusque, Erwin lâcha la main d'Alexis et déploya ses bras tout autour d'elle pour la serrer contre lui. Il y avait un t-shirt froid entre eux, mais Erwin crut pourtant sentir la peau d'Alexis et sa chaleur à travers le tissu mouillé. Il la serra encore un peu plus fort et approcha ses lèvres de son oreille.

"Personne n'a raison de ne pas vouloir de toi, Alexis. Moi, je veux de toi. J'ai besoin de toi."

Le fils de Neptune entendit comme un sanglot, il eut peur qu'Alexis lui dise de partir. Il frissonna lorsqu'il sentit deux mains dans son dos.