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Sitting under purple skies - Samallie
 :: À travers le monde :: L'espace-temps :: Univers alternatif
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    Sitting under purple skies - Samallie

    contexte:


    Le soleil se levait doucement au loin. Samael savait que son réveil n'allait pas tarder à sonner. L'heure était au départ. Il désactiva l'alarme de son téléphone et s'habilla avec empressement, avant de fourrer ses affaires dans son sac. Depuis son réveil au bord de cet autoroute, il n'avait de souvenirs que ceux qu'il avait amassé depuis ce moment-là. Pour ce qui est du reste de sa vie… plus rien. Tout avait été balayé, en un claquement de doigt. Il n'avait plus que son épée qui, sans savoir comment, se changeait en javelot, et ce pendentif qui se transformait en bouclier.

    Samael survivait difficilement. Il volait à droite à gauche, de l'argent, de la nourriture, de l'eau et des cafés, et s'il s'était déjà fait prendre, il courait toujours assez vite pour ne pas se faire embarquer au poste. De plus, il se faisait attaquer par des monstres hideux et surtout dangereux, assez régulièrement, et les semer dans la foule était sans doute la meilleure stratégie qui soit, mais ce n'était pas suffisant pour éviter l'affrontement la plupart du temps. Il s'en sortait relativement bien en général, pas forcément indemne, mais au moins vivant.

    Chaque jour, il mettait la faible quantité d'argent qu'il récupérait dans une boîte en métal fine qu'il plaçait dans sa poche intérieure, contre son cœur. Cet argent, il l'espérait, servirait à retracer ses origines, quelles qu'elles soient, et à rentrer chez lui. S'il en avait un. Cette sensation d'étau qui le prenait à la gorge à chaque fois qu'il songeait au vide immense qu'était sa vie le mettait en rage. Des mois qu'il vivait dans la rue, des mois qu'il essayait de mettre le doigt sur ses souvenirs, des mois qu'il tentait de déchiffrer son tatouage au bras droit, des mois qu'il errait sans que rien ne se concrétise.

    Il soupira d'un air fatigué. Il fallait qu'il sorte de ce trou. Le squat dans lequel il avait élu domicile n'allait pas tarder à être détruit pour un nouveau chantier. Et puis, ils finiraient par retrouver sa trace à force de rester tout le temps au même endroit. Il fallait qu'il trouve un autre endroit. Un nouveau lieu, une nouvelle ville peut-être. Combien avait-il accumulé depuis son réveil sur l'asphalte ? Il ouvrit la boîte et compta les billets. Deux cents dollars. Ce serait peut-être assez pour prendre le bus jusqu'à New York. New York semblait être une meilleure destination, au moins, il ne crèverait pas de chaud là-bas, contrairement à Los Angeles.

    C'était décidé. Au cours des derniers mois, il s'était procuré des faux papiers, pas de grande qualité si on poussait l'analyse, mais tout juste assez pour passer à peu près inaperçu. Il se leva finalement du matelas sali par la crasse et son sac sur l'épaule, il passa le chambranle de la porte inexistante de la chambre avant de sauter par la fenêtre pour rejoindre la rue. Il était déconseillé d'utiliser la porte car elle menaçait de s'effondrer à chaque utilisation, et il lui était arrivé de se la prendre sur le coin du nez.

    Il parcouru les rues sales, les moins reluisantes de toute la ville, là où le vice dégoulinait des murs, avant d'enfin rejoindre un quartier plus accueillant. Samael en profita pour bousculer quelques passants et leur emprunter au passage les quelques dollars qu'ils avaient dans la poche. Il passa devant les étals de marchandise, en ne prit pas la peine de payer la pomme qu'il mangerait ce matin. Il continua de marcher jusqu'à la gare routière. Il ne s'était pas encore renseigné sur le prix du billet ni sur les horaires de passages, mais s'il trouvait un coin libre là-bas, il s'en accommoderait. Le trajet fut long, et il dut courir à plusieurs reprises pour échapper à la vigilance des vendeurs.

    Il croisa le chemin d'un homme gigantesque qui le regardait avec une délectation malsaine dans les yeux. Il l'ignora, mais son ombre gigantesque le dépassait alors qu'il marchait. Il était suivi. Il tenta de marcher plus vite, de slalomer entre les passants pour le semer, mais rien n'y faisait, ses jambes gigantesques avaient toujours raison de la distance qui les séparaient. Alors il emprunta une ruelle adjacente, déserte, qui menait à un angle pour, probablement, rejoindre une autre avenue. Il tira sur son collier et son bouclier se déploya tandis qu'entre ses doigts, sa pièce prit la forme d'un javelot.

    Il faisait face à un géant d'au moins deux mètres. Lorsque sa main, grosse comme un couvercle de poubelle s'abattit sur lui, il eu le réflexe de faire un bond en arrière et de planter la pointe de son javelot dans la chair du Monstre. Il tint fermement le manche pour récupérer son arme alors que le géant tirait sa main vers lui. Finalement, la lance se délogea et Samael tenta le tout pour le tout. Il envoya son javelot droit dans la gorge du monstre et se prit au passage son autre main qui l'envoya rouler au sol. Si la situation dégénérait, il aurait toujours ses pouvoirs pour lui sauver la mise. Enfin, le géant arracha la lance de sa chair – elle avait l'air d'un cure dent entre ses doigts – et reporta son attention sur Samael. Qui n'avait plus d'armes.

    Il poussa un juron et se tint prêt à bondir. Vaincre cette créature à mains nues serait impossible, il lui fallait être plus malin. Le moindre contact avec sa peau, et il pourrait lui absorber son énergie. Le géant fit un pas de plus vers lui, les lèvres retroussées en un sourire vicieux. Samael attendit le moment opportun pour bondir sur le côté alors que le géant envoyait de nouveau sa main vers lui. Puis il se jeta sur son poing fermé et absorba toute l'énergie qu'il pouvait avant de rouler loin de lui. Le géant trébucha d'un air comateux puis lâcha le javelot, que Samael s'empressa de récupérer avant de l'achever.

    Débarrassé de son adversaire mais recouvert d'une poudre dorée, il était enfin tranquille mais vraiment trop peu passe partout. Il s'épousseta avant de trouver son état acceptable, puis il reprit sa marche en direction de la gare routière. Le bus passerait ce soir, et le déposerait à New York deux jours plus tard.

    ***


    Lorsqu'il s'étira, faisait craquer toutes ses articulations, et descendit du bus, il pleuvait. Et il était en t-shirt. Peu importe, il était à New York, saint et sauf. Il ne savait pas vraiment ou aller, alors il prit une direction au hasard. Il aurait bien le temps plus tard de retenir les trajets importants. Pour le moment, il disposait d'une centaine de dollars, et il lui fallait une veste.

    Lorsqu'il entra dans la boutique, il repéra ce qu'il lui fallait en un clin d'œil et ressortit habillé aussi vite qu'il n'était arrivé. Plus que cinquante dollars. Samael soupira et remit son sac sur l'épaule en déambulant dans les rues pleines de monde. New York grouillait encore plus que Los Angeles. Ce qui n'était pas plus mal, pour lui en tout cas, qui survivait en pillant les passants. Samael passa la journée à faire du repérage et lorsque la nuit tomba, il s'abrita sous un arrêt de bus déserté. À quelques pas de là, une vieille dame racontait en boucle à quel point les croissants de la boucherie étaient sanguinolent, ce qui n'avait aucun sens, un homme abandonnait son chien, et un autre urinait le long du mur.

    Son attention se fixa sur celui au chien et le mépris et la colère envahirent tous ses sens. Il attendit néanmoins qu'il fut parti pour se diriger vers la petite boule de poil. Un jeune chiot. Un bâtard, probablement. Samael soupira de nouveau en lui caressant la tête, veillant à ne pas déclencher son pouvoir par mégarde. Le chiot pleurait et essayait de se dégager de la corde qui le maintenant au poteau pour courir derrière son maître, ce qui lui fendait le cœur. Il n'avait pas les moyens de garder un chien. Et pourtant il décida le contraire.

    Quelques dizaines de minutes plus tard, il avait un sac de croquette, une bouteille d'eau et deux gamelles dans son sac à dos. Heureusement qu'il avait de la marge niveau place.

    ***


    Quelques semaines avaient passé, et son quotidien n'avait pas tant changé que ça. Il occupait la plupart de ses journées en se consacrant à l'éducation du chiot, en se baladant et en échappant aux monstres qui voulaient sa mort. Il avait tenté de mener l'enquête sur son tatouage au bras droit, mais aucune piste n'avait été dénichée, et toutes les personnes qui le regardaient restaient perplexe, ne sachant quoi lui dire. Parfois, il se sentait à deux doigts d'abandonner tout espoir de rattraper son passé. Ce soir était un de ces moments-là.

    Il continua la traversée des rues, accompagné par le chiot qui n'avait toujours pas de nom, et fut interpellé par un bruyant raclement de métal dans une petite ruelle collée à un restaurant miteux. Fronçant les sourcils, il se dirigea vers ce qui avait tout l'air d'être un coupe-gorge et attacha le chiot au poteau avant de lui intimer de ne pas aboyer. Je reviens vite, promis. Une silhouette sombre chuinta alors d'une voix sifflante :

    "Ah, un autre sang-mêlé… Bienvenue."

    Un autre sang-mêlé. Ce n'était pas la première fois qu'il se faisait qualifier de la sorte, mais il n'avait jamais pu pousser les interrogatoires bien loin vue la violence dont ils faisaient preuve à son encontre. Une blonde acculée au mur semblait mitigée entre la peur et la colère. Mais ils n'avaient pas le temps de se scruter l'un l'autre, et Samael déploya le bouclier et son javelot. Pourtant, lorsqu'il croisa ses yeux, à cette blonde… Il fut traversé par un sentiment de déjà-vu. Les yeux bleus de la cellule.
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      Re: Sitting under purple skies - Samallie

      Sur la fenêtre du taxi, son reflet brumeux, coloré par le mauve des nuages du soir

      Des vacances. On lui avait donné des vacances, enfin donné, c’était un euphémisme, tant l’acte avait été forcé. Chiron, Apollon et June, avec le soutien silencieux d’Artémis, s’étaient ligués contre elle pour l’envoyer loin de la Colonie, le temps qu’elle se remette. Qu’elle se remette de quoi au juste ? Oui, elle s’entraînait sans relâche, s’épuisant à la tâche, oui elle se plongeait corps et âme dans le combat, oubliant parfois de manger, refusant souvent de parler, de s’amuser, de s’accorder une pause, de tisser des liens avec les autres, oui, et alors ? N’était-ce pas le but de ces fichus camps d’été, justement, de les préparer à affronter tout ce que la vie jugerait bon de leur jeter à la figure, tous les monstres que le Tortionnaire mettraient sur leur long chemin vers la vengeance ? Ils auraient dû être contents, non ? Eux qui déploraient auparavant le manque d’enthousiasme de Billie pour les activités guerrières, étaient désormais presque déçus de la voir si combative.

      Quoi ? Elle avait fini par comprendre les enjeux, non ? Elle avait fini par s’intéresser à leur stupide mission dérisoire et éternelle, à leur lutte incessante contre des êtres immortels, elle avait fini par s’y mettre véritablement, sans rechigner. Alors quelle importance si elle se négligeait désormais, quelle importance s’il n’y avait plus que cette quête qui comptait, quelle importance si elle y mettait trop d’entrain ? Aucune, tout cela n’aurait dû avoir aucune importance. Mais évidemment, il avait fallu que le cœur sensible de Chiron s’en mêle et qu’il prenne une décision pour soulager son inquiétude inutile. Et Billie avait eu beau tempêter, négocier, hurler, supplier, insulter, flatter, le centaure était demeuré inflexible à ses appels. Sa sentence était sans appel. Billie avait besoin de vacances, peu importe ce qu’elle en pensait, elle. Et encore une fois, on la traitait comme une gamine capricieuse, encore une fois on refusait de lui donner voix au chapitre, encore une fois on prenait les décisions pour elle.

      Encore une fois, elle s’y était pliée, consciente qu’elle n’avait pas d’autre choix, que son implication dans des quêtes futures destinées à débusquer sa némésis dépendrait de la foi qu’il plaçaient en elle. Si elle se montrait trop instable, trop impulsive, trop individualiste, trop butée, ils lui refuseraient la vengeance qu’elle s’évertuait à atteindre depuis près d’une année. Et elle ne les laisserait pas lui arracher son seul espoir de trouver un jour la paix.

      Dans le miroir immense, son reflet las, souligné par des cernes violacés

      Elle avait posé ses valises à New-York, dans un loft désert que ses parents lui avaient laissé, comme un cadeau pour compenser leur absence. Chacun sur un tournage à l’autre bout du monde, chacun trop occupé pour voir leur petite blonde, et la voilà seule dans son immense appartement luxueux rempli de meubles hors de prix, au dernier étage d’un gratte-ciel situé dans un quartier huppé. C’était ce qu’elle avait toujours connu, au fond, elle n’aurait pas dû être déstabilisée, trop habituée à ces conditions de vie privilégiées, pourtant c’était presque perturbant de retrouver un tel confort après des mois à lutter pour ne serait-ce qu’une douche tiède, à suer sous l’effort sans pouvoir régulièrement se changer, à dormir sur un matelas trop dur et pas assez large pour accueillir son corps de princesse en position étoile de mer, à partager tous les moments de la vie quotidienne avec des dizaines d’autres adolescents qui étaient à peine plus que des étrangers. Oui, c’était étrange, et curieusement pas aussi réconfortant qu’elle aurait cru, de retrouver le luxe dans lequel elle avait toujours vécu.

      C’était comme se retrouver projetée dans la vie d’une autre, une inconnue familière, une personne qu’elle n’était plus. C’était comme un retour dans un passé qu’elle ne reconnaissait plus, qu’elle avait depuis trop longtemps perdu de vue. Depuis la Colonie. Depuis Sara. Depuis le Tortionnaire. Depuis la Chasse. Il y avait à peine deux ans qu’elle se pavanait encore devant un miroir similaire, essayant mille tenues l’une après l’autre, gloussant avec ses amies, discutant de la prochaine avant-première, des dernières rumeurs hollywoodiennes, de la robe sur-mesure que porterait sa mère pour marcher sur le tapis rouge. C’était encore il y avait à peine deux ans qu’elle comptait avec angoisse les jours qui la séparaient de son prochain départ pour la Colonie qu’elle haïssait, qu’elle mettait en œuvre mille stratégies pour rester, qu’elle maudissait ses pouvoirs et tout ce qu’ils représentaient. Deux ans. Puis Sara était arrivée et, comme un ouragan, avait tout balayé. Avec elle, Billie avait caressé mille rêves pastel, monté mille projets colorés, avec elle Billie avait voulu tout revivre, lui faire découvrir son monde pailleté, marcher avec elle dans les coulisses des comédies romantiques clichées. A Sara, Billie aurait voulu tout donner, mais elle était partie en fumée. Et Billie se retrouvait seule, soudain consciente de l’inutilité de la richesse quand on n’a personne avec qui la partager.

      La vérité, c’est que ce loft vide ne faisait que lui rappeler plus cruellement encore que Sara ne serait jamais avec elle, que jamais elle ne se vautrerait dans le lit King Size en se moquant de l’opulence des meubles de Billie, que jamais ses yeux ne brilleraient devant un énorme fraisier commandé chez le pâtissier, que jamais elle ne montrerait une tête exagérément blasée quand Billie mettrait sur son écran géant le film dans lequel ses parents s’étaient rencontrés. Et tout ce luxe n’avait aucun intérêt, si Sara n’était pas là pour en profiter.

      Sur le selfie stylisé, son reflet fier, le bleu de ses yeux accentué par un fard à paupières lilas

      Elle avait repris sa vie d’avant, ou presque. En quelques jours à peine, elle avait recontacté des amies perdues de vue, réactivé les comptes morts de tous ses réseaux sociaux, inventé un mystère autour de sa disparition, lancé la mode de la retraite bouddhiste spécial star chez les followers qui n’avaient pas perdu foi en elle. Pour lutter contre la vacuité de sa nouvelle vie sans but, elle s’était inventé mille occupations futiles, avait renoué avec la Billie qu’elle avait été si longtemps. Ce n’était pas si difficile finalement. Chassez le naturel, il revient au galop. Et dans le tourbillon de l’apparence et l’image, sa quête prenait des contours flous et brumeux, se dissipait derrière les mille autres préoccupations minimes qui la saisissaient. Quel filtre mettre sur cette photo ? A quel café inviter cette amie ? Quelle tenue porter pour sortir dans la rue ? Et les autres questions – Quelle arme pour tuer le Tortionnaire ? Avec qui s’entraîner aujourd’hui ? Comment progresser au tir à l’arc ? – s’étaient peu à peu émoussées dans son esprit.

      Oh, elle n’en oubliait pas son but pour autant. Mais elle prenait des vacances, c’était ce qu’on lui avait demandé, non ? Alors qu’à cela ne tienne, elle avait pris leurs directives à la lettre et deux semaines après son départ forcé, elle commençait à en sentir les bienfaits. Oh, elle ne le dirait jamais devant Chiron ou June, évidemment, mais c’était agréable de sortir des combats constants contre son corps, contre le temps, contre ses adversaires, contre les mannequins de paille, contre ses peurs, contre sa culpabilité, contre son impatience, contre leur immobilité. Alors oui, elle avait mis de côté ce monde de mythes et de créatures monstrueuses pour revenir à une réalité plus édulcorée mais non moins cruelle, dans un monde où le moindre faux-pas pouvait faire sortir de l’ombre des monstres presque aussi dangereux que les drakainas.

      Et bien sûr, Billie ne l’avait pas vue, la drakaina, les yeux vissés sur son écran, les écouteurs vissés dans ses oreilles. Elle n’avait pas vu cette femme à la démarche ondulante qui la suivait dans la rue, jusqu’à ce qu’elle atteigne un lieu moins fréquenté, dans lequel elle ne serait jamais allée si elle avait fait plus attention à ce que ses pieds faisaient. Et quand elle leva la tête pour observer les environs, le monstre était là devant elle, canines pointues et langue fourchue apparentes dans un sourire satisfait. « Alors petite sssssang-mêlée, on sssss’est perdue ? » Billie cligna des yeux, tétanisée. Oublié l’entraînement, oubliés ses réflexes, oubliés ses flèches qui n’auraient d’aussi près aucun effet. Il lui restait ses poignards mais la créature avait profité de son inattention pour saisir ses poignets et les tordre, approchant son visage du sien pour se délecter de sa peur. « Voilà un délisssieux repas pour Ssssassssy. » Autant pour les vacances. La tranquillité pour deux semaines, c’était apparemment trop demander.

      Dans ses yeux ébahis, son reflet pâle, mêlé à celui des cieux violets

      Sauvée par le gong. Un instant décontenancée par la présence de l’autre demi-dieu qu’elle ne reconnaissait pas, Billie se ressaisit pour autant plus vite que sa geôlière qui semblait hésiter sur le plat avec lequel elle souhaitait commencer son dîner. La chasseresse saisit cette occasion pour lever son genou et frapper violemment l’abdomen de la créature reptilienne qui la maintenait toujours. Elle parvint à libérer une de ses mains et invoqua un de ses poignards qu’elle planta dans le bras de la femme-serpent qui se désintégra au contact du bronze céleste, non sans avoir émis auparavant un gargouillis sonore qui hérissa la fille d’Aphrodite. Etait-elle venue seule ou ses sœurs difformes étaient-elles aussi dans le coin ? Billie n’avait pas le temps de vérifier son hypothèse, mieux valait fuir plutôt que d’affronter elle ne savait combien de monstres aux langues fourchues.

      Passant devant son compagnon d’infortune, elle lui attrapa la main sur une impulsion, se mettant à courir avec lui. Il serait une cible trop facile s’il restait là immobile, à la merci de n’importe quel monstre à l’odorat un tant soit peu développé. Mieux valait se cacher ensemble brièvement avant de retourner chacun à son chemin solitaire. Slalomant entre les passants avec une dextérité qu’elle avait acquise depuis son serment, Billie garda la main de l’autre fermement serrée dans la sienne, s’ancrant à ce contact bien plus qu’elle ne l’aurait voulu, comme pour sortir de la solitude dans laquelle elle s’était noyée ces derniers jours, en dépit des multiples interactions sociales qu’elle avait eues tous les jours. Cette course n’avait rien à voir avec sa vie ces dernières semaines, l’adrénaline, les sensations, le cœur battant à toute allure, le danger, l’action, le souffle court, la chaleur moite de leurs deux paumes collées. Tout était bien plus réel, tout la faisait se sentir bien plus vivante. Bien plus présente, comme si elle se réveillait d’un long sommeil.

      Après quelques détours d’une rue à l’autre, ils atterrirent devant un restaurant que Billie avait plusieurs fois fréquenté, et où elle espérait qu’aucun monstre ne les avait suivis et repérés. Elle réalisa alors que son poignard était toujours de sortie, dans sa main libre, probablement transformé par la Brume en une perche à selfie et s’empressa de le faire disparaître, tout en lâchant précipitamment la main du sang-mêlé qui avait réussi à la suivre. Probablement pas un nouveau venu, il semblait avoir de l’endurance et de l’entraînement. Alors qu'elle s'apprêtait à entrer dans l'établissement, un petit aboiement retentit à ses pieds et elle fixa le chiot qui venait de protester, interloquée. Elle releva la tête pour croiser le regard de son compagnon d'infortune.

      C'est ton chien ? Ils le laisseront pas entrer ici.

      Un geste de la main vers la devanture luxueuse du restaurant et une expression éloquente sur le visage, elle fixait toujours le sang-mêlé, l'air de dire "laisse le ici et viens". Ils n'avaient pas le temps d'hésiter.

      Si on se bouge pas, elles vont nous rattraper.
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