Prima, enfin, tu ne peux pas continuer à foncer dans le tas comme ça. Si elle ne le fait pas, qui le fera à sa place ? Prima, Vesta ne t’as pas donné ce pouvoir pour que tu puisse te battre ! Personne ne sait ce que voulait réellement Vesta, Prima avait bien le droit d’interpréter ses actions comme elle le désirait. Prima, c’est impensable, tu ne peux pas te faire forger une arme ! Comment était-elle supposée défendre la cité si elle ne pouvait pas affronter les criminels ?

Malgré sa détermination, Prima se retrouvait face à de nouveaux murs à chaque nouvelle décision qu’elle prenait. Elle ne devait pas faire ça, elle ne pouvait pas faire ça, elle devait être sage, se contenter de respecter les traditions. Elle les respectait, bien entendu. Tant qu’elles étaient logiques. Or, la tradition qui disait que les vestales n’avaient pas le droit de se battre était complètement illogique lorsqu’on la comparait avec leur devoir de protéger la cité.

Et pourtant, elle était bien la seule à voir cela de cette manière. Même celle qui lui avait tout appris, qui lui avait dit à quel point il fallait qu’elle se méfie des Chimères, pensait qu’il ne fallait pas pour autant leur tenir directement tête. Qu’il fallait passer par la politique et faire confiance aux légionnaires. En plus de cela, aucun des forgerons que Prima était allée voir n’acceptait de lui créer un fouet sous prétexte qu’ils mettraient leur réputation en danger s’ils osaient armer une vestale. Ça en devenait presque ridicule.

Finalement, Prima eut la chance d’entendre parler de la gérante de l’armurerie. Apparemment, en plus d’entretenir les armes des légionnaires, elle pouvait aussi en fabriquer et elle n’était pas très très regardante sur sa clientèle. Elle n’avait pas toujours une excellente réputation, mais son travail était visiblement apprécié. Sans plus attendre, Prima profita du premier temps libre venu pour se rendre en direction de l’armurerie.

Elle ne s’aventurait pas souvent dans le Camp, préférant rester dans l’enceinte de la cité, mais était toujours impressionnée par les légionnaires. La plupart des légionnaires étaient bien plus grand et plus impressionnants que Prima, qui faisait son chemin discrètement jusqu’à l’armurerie. En poussant la porte, elle eut la chance d’être accueillie par un bâtiment presque vide. Il y avait deux ou trois légionnaires regardant les étagères ou rangeant des armes à leur place.

Faisant attention à ne déranger personne, elle marcha jusqu’au comptoir tout en regardant les nombreuses armes. Pas beaucoup de fouets. Est-ce que cette armurière saurait lui en fournir un malgré tout ? En arrivant au comptoir, Prima appuya une seule fois sur la petite sonnette pour signaler qu’elle était là.  Maxine devait certainement être à l’arrière.

Où est-ce qu’elle avait bien pu mettre ce foutu morceau de bouclier ? Elle avait fouillé toute sa boutique et retournait sa remise pour la troisième fois. Elle avait retrouvé des objets dont elle ne se rappelait même plus l’existence, mais impossible de mettre la main sur ce foutu morceau de métal. Où est-ce qu’il pourrait bien être ? Maxine pesta en se maudissant intérieurement pour ne pas ranger et indexer tout ce qui pouvait traîner dans son armurerie. C’était décidé, dès demain, elle s’y collerait. Elle répertorierait absolument tout, essaierait de trouver de la place à tous ses morceaux d’armures et d’armes et de matériaux quelconques, peut-être même installer deux trois étagères… et elle finirait bien par retomber sur ce foutu morceau de bouclier.

Maxine avait les mains posées sur les hanches, contemplant le bordel sans nom devant ses yeux et soufflant d’un air exaspéré sur une mèche qui s’était échappée de sa queue de cheval lorsqu’elle entendit la sonnette de la boutique. Le petit son aigu lui arracha un grognement. La fille de Vulcain savait qu’elle ne devrait pas râler de savoir qu’un client entrait dans sa boutique puisque c’était précisément le but même d’avoir une boutique. Mais elle ne pouvait pas s’en empêcher. Les gens… c’était juste pas son truc.

D’un air blasé, Maxine sorti de sa remise pour aller à la rencontre de l’individu qui l’avait arrachée de sa contemplation du chaos qu’était son arrière-boutique. Une expression de surprise failli fissurer le masque blasé de Maxine lorsqu’elle reconnut qui se trouvait derrière son comptoir. Ça pour une surprise. Prima était l’une des vestales de la Nouvelle-Rome et, comme tout le monde le savait, les vestales et le combat, c’était censé faire deux. La fille de Vulcain n’était pas non plus sans savoir que Prima semblait avoir fait des Chimères ses ennemis numéro un, l’ennemi national, la peste noire de la Nouvelle-Rome, enfin tout ce que vous voulez quoi.

« Salut. Je crois que tu t’es perdue, c’est une armurerie ici, au cas où t’avais pas compris. »

De son air blasé naturel, Maxine fit un signe vague de la main pour désigner toutes les armes qui trônaient dans sa boutique. Le ton de l'armurière n'était pas mauvais, ni méprisant, ni même sarcastique, il était juste blasé. Ou peut-être légèrement sarcastique et très blasé... En tous cas, le regard déterminé de Prima lui fit comprendre avant qu’elle ouvre la bouche qu’elle savait très bien où elle se trouvait. Un sourire en coin subtil se dessina sur les lèvres de l’armurière.

Cette rencontre promettait d’être intéressante.

Fidèle à sa réputation, le visage de Maxine affiché une expression froide, à la limite entre l’indifférence et le mépris, certainement. Prima ne s’en offusqua pas : puisqu’elle était apparemment ainsi avec tout le monde, il s’agissait simplement de sa manière d’être. Ceci étant dit, il était vrai que la manière dont elle s’adresse à Prima la fit se poser des questions. Était-elle vraiment la bonne personne pour ce travail ? Elle ne le saurait pas avant de le lui avoir demandé, de toutes façons.

Prima se redressa, affichant sa détermination. Il lui fallait absolument s’armer si elle voulait pouvoir protéger les civils, et puisque tous les autres forgerons du coin semblaient refuser de l’aider, il n’y avait plus que Maxine. Prima fit son possible pour avoir l’air sûre d’elle, allant jusqu’à froncer les sourcils. Expression que l’on ne voyait que très rarement sur son visage tant elle était habituée à simplement sourire.

“Je sais bien où je suis. Je sais aussi que vous êtes assez peu regardante pour accepter de me créer une arme. Sauf si je me suis en effet trompée et que vous êtes aussi bornée et ancrée dans le passé que les autres forgerons.”

Ce n’était absolument pas le genre de Prima de parler de la sorte. D’ailleurs, elle comprenait bien que ces autres forgerons qui refusaient de lui créer un fouet le faisaient principalement pour se protéger eux-même. Elle ne pouvait pas leur en vouloir. Cependant, elle savait qu’avec Maxine, il fallait qu’elle donne l’impression d’être une dure à cuire, et ce même si elle ne devait pas être très impressionnante. Il était même possible que son expression faciale tienne plus de la grimace que de la détermination, sans compter le fait qu’elle se soit mise à chuchoter pour éviter d’attirer l’attention sur elles.

“On m’a dit que vous seriez en mesure de m’aider, et j’ai vraiment besoin d’une arme si je veux pouvoir défendre la cité, comme mon rôle me le demande, quoiqu’en disent les autres.”

Au final, Prima n’aurait pas joué la dure très longtemps. Son regard s’était déjà adouci légèrement et son ton était de nouveau celui dont elle avait l’habitude. Jouer la comédie était quelque chose qu’elle n’aimait pas et elle voulait être aussi honnête que possible avec Maxine. Elle s’en voudrait si l’armurière se retrouvait avec des ennuis par sa faute.

«  Je sais bien où je suis. Je sais aussi que vous êtes assez peu regardante pour accepter de me créer une arme. Sauf si je me suis en effet trompée et que vous êtes aussi bornée et ancrée dans le passé que les autres forgerons. »

Et ben. Elle avait du cran, la petite. Ou tout du moins c’était l’impression qu’elle souhaitait visiblement donner à Maxine qui, malgré son masque blasé, était relativement impressionnée par la détermination de Prima. L’air féroce que la vestale souhaitait se donner ressemblait plus à une moue boudeuse digne d’un enfant de 5 ans mais le restant du discours était plutôt convaincant même si l’armurière avait du tendre l’oreille pour entendre la fin de la phrase.

Aussi bornée et ancrée dans le passé que les autres forgerons. Et ben… elle n’avait pas froid aux yeux, cette Prima, pour venir dire ça à l’ancienne apprentie de l’un de ces dits forgerons émérites. La curiosité piquée au vif, Maxine se contenta de croiser les bras en attendant la suite du discours passionné mais pas trop quand même de la vestale.

«  On m’a dit que vous seriez en mesure de m’aider, et j’ai vraiment besoin d’une arme si je veux pouvoir défendre la cité, comme mon rôle me le demande, quoiqu’en disent les autres. »

Connaissant la haine et le mépris de Prima envers les Chimères, Maxine aurait du la jeter hors de sa boutique à coup de poings mais… elle ne pouvait s’empêcher d’éprouver une certaine… admiration ? pour la témérité et la détermination de cette jeune demoiselle qui n’avait franchement pas l’air farouche pour un sou. Pourtant, elle mettait son devoir et son honneur en tant que vestale au premier plan, bravant même les interdits imposés par les siens pour faire ce qui lui semblait juste.

Même si on était clairement pas dans le même registre, le sens de l’honneur de la yakuza qui sommeillait en Maxine fut touché par le discours de la jeune femme. Et puis, vraiment, armer une vestale… Maxine ne pouvait pas résister à l’ironie de la situation. Rae n’avait pas forcément besoin de le savoir… Et puis au pire elle râlerait un petit peu et puis voilà. Maxine n’était que membre honoraire après tout…

«  Et avec quel genre d’arme voudrais-tu terrasser les ennemis de la Nouvelle-Rome, petite vestale ? »

La situation ne devrait pas autant amuser Maxine mais vraiment, elle vivait pour ce genre de moments.

Prima s’imaginait-elle des choses ou bien voyait-elle vraiment un sourire poindre sur le visage de l’armurière ? Ça devait n’être que son imagination puisque, à bien y regarder, son visage était toujours aussi neutre qu’à l’arrivée de Prima. Savait-elle au moins sourire ? Oui, certainement, tout le monde avait une raison de sourire de temps en temps. De toutes façons, ce n’était pas le problème de Prima, qui n’était là que pour son arme, pas pour faire amie-amie.

Et avec quel genre d’arme voudrais-tu terrasser les ennemis de la Nouvelle-Rome, petite vestale ? Prima se renfrogna en l’entendant parler. Elle ne put s’empêcher de froncer les sourcils et de faire un pas en arrière avant de se reprendre. Était-ce l’impression qu’elle renvoyait ? Celle d’une personne voulant terrasser ses ennemis ? Elle ne considérait d’ailleurs pas réellement qu’elle avait des ennemis, tout juste des personnes avec lesquels elle était en désaccord, et qu’il fallait aider à revenir dans le droit chemin. Prima fit de son mieux pour ne pas faire entendre son mécontentement dans sa voix, mais c’était une cause perdue. Elle était une très mauvaise menteuse.

“Je ne compte terrasser personne. C’est pourquoi je suis à la recherche d’un fouet. Pour pouvoir entraver mes opposants sans blesser qui que ce soit. D’ailleurs, j’ai entendu dire que certaines armes pouvaient se transformer d’une autre manière pour leur transport. Est-ce qu’il serait possible d’en faire une paire de menottes ? Ce serait parfait pour moi.”

Prima avait peur d’avoir été un peu trop directe et d’en avoir demandé trop, trop vite, pourtant si elle ne disait pas exactement ce qu’elle avait en tête, alors il se pourrait que Maxine comprenne mal et que l’arme ne finisse par ne pas lui convenir. Prima tourna la tête, distraitement, pour jeter un nouveau coup d’œil dans l’armurerie qui était maintenant vide, si ce n’est pour les deux jeunes femmes au comptoir.

“Je vois que vous n’avez pas de fouet en exposition, j’espère que c’est tout de même dans vos capacités.”

Elle ne voulait pas vraiment le laisser paraître, mais Maxine était à peu près son seul espoir. Si elle refusait, Prima aurait fait le tour de tous les forgerons et armuriers officiels de la Nouvelle-Rome et du Camp. Ensuite, il faudrait aller voir des gens moins qualifiés, qui produiraient peut-être un travail de moins bonne qualité. Et Prima voulait être sûre que son fouet soit parfait.

«  Je ne compte terrasser personne. C’est pourquoi je suis à la recherche d’un fouet. Pour pouvoir entraver mes opposants sans blesser qui que ce soit. D’ailleurs, j’ai entendu dire que certaines armes pouvaient se transformer d’une autre manière pour leur transport. Est-ce qu’il serait possible d’en faire une paire de menottes ? Ce serait parfait pour moi. »

Des menottes. C’était vraiment de mieux en mieux. Maxine imaginait déjà Prima, sifflet à la main , en train de faire siffler son fouet pour impressionner ses « opposants ». Ils seraient très certainement trop apeurés pour oser bouger, pétrifiés de peur devant cette petite vestale et manqueraient probablement de faire un arrêt en voyant son fouet se transformer en menottes. Pour les emmener ou ? Personne ne le saura jamais…

Oui vraiment c’était beaucoup trop drôle pour que Maxine n’accepte pas. Elle observait encore Prima avant de lui donner sa réponse, cachant parfaitement son amusement derrière son air blasé. La vestale semblait balayer la boutique des yeux, probablement à la recherche d’un outil pour pourfendre ses enn… enfin ses « opposants ».

«  Je vois que vous n’avez pas de fouet en exposition, j’espère que c’est tout de même dans vos capacités. »

Dans ses cap… non mais elle se prenait pour qui ? L’armurière avait déjà fabriqué des fouets biens plus létaux que le petit joujou que lui demandait Prima.

« Je suis la fille de Vulcain et tu ne me penses pas capable de fabriquer un fouet ? C’est presque insultant… »

Maxine ne laissa pas le temps à la vestale de se confondre en excuses et continua sur sa lancée.

«  Bon et donc ton fouet, à part qu’il se transforme en menottes, tu veux quoi ? Des piques ? Un mécanisme pour pouvoir l’imprégner de poison ? Qu’il se termine par une lame affûtée ? Ton imagination est ma seule limite. A moins que t’es une imagination exceptionnellement tordue. Ce qui m’a pas vraiment l’air d’être le cas. »

La fille de Vulcain leva un sourcil devant l’absence de réponse immédiate de Prima. La vestale semblait à moitié perdue et à moitié effrayée par ce qu’elle venait d’entendre. Maxine ne put s’empêcher d’afficher un semblant de sourire moqueur.

Qu’est-ce qu’elle allait bien pouvoir lui sortir, cette fois-ci ?

Prima avait fait une erreur. Elle s’en rendit compte lorsque Maxine s’en plaignit. Elle ne pensait pourtant pas à mal : elle n’y connaissait rien en création d’arme, et pensait que forger une arme en acier et créer un fouet étaient deux processus très différents, qui demandaient peut-être des spécialisations. Comment pouvait-elle savoir que Maxine était capable des deux ? Prima était sur le point de lui expliquer et de lui présenter ses excuses lorsque Maxine reprit la parole pour demander des précisions.

Piques, poison, lame. Prima frissonna. Si elle n’avait pas été une vestale... Non, en vérité, même si elle n’avait pas été une vestale, elle aurait certainement été contre le fait de blesser les autres de manière significative. Le simple fait de pouvoir se retrouver contre une personne dont le fouet était pourvu de piques empoisonnées instilla une graine de peur dans l’estomac de Prima. Il allait vraiment falloir qu’elle s’entraîne sérieusement, si elle voulait avoir une chance contre des combattants prêts à tuer leurs opposants. Et quelque chose lui disait que les Chimères avaient un paquet de ces combattants-là.

Pourtant, Prima ne pouvait pas se laisser aller à ce jeu. Il fallait qu’elle reste sûre de ses convictions. Elle devait déjà bien assez offenser Vesta en prévoyant de se battre, elle ne pouvait pas en faire trop. Non, un fout simple ferait largement l’affaire. Prima prit une inspiration pour se donner du courage et faire face à l’armurière au regard de glace et au sourire ambigu.

“Je ne veux rien de tout ça. Juste un fouet pour entraver les autres. Si je voulais leur faire du mal, j’aurais certainement demandé une épée, comme tout le monde.”

Prima, d’habitude gentille et compréhensive, avait beaucoup de mal à se montrer patiente avec Maxine. Celle-ci semblait s’amuser avec elle, ce qui lui déplaisait grandement. Elle essayait de se concentrer sur les bons côtés de Maxine, pour se rappeler qu’elle méritait tout autant d’amour que les autres. Elle forgeait de très bonnes armes. Elle était respectée, donc certainement respectable... Mais ce regard. Ce regard qu’elle avait faisait froid dans le dos et dérangeait trop Prima pour qu’elle puisse se concentrer sur les points positifs.

En réalité, Maxine lui faisait peur et plus Prima passait de temps en sa compagnie, plus ses instincts lui disaient de s’enfuir à toutes jambes. Seulement, elle ne le pouvait pas. Elle avait besoin de ce fouet et Maxine était la seule à pouvoir le lui fournir. Alors Prima ancra ses pieds dans le sol, et soutint le regard de Maxine, peu importe combien ses instincts lui disaient de sortir de cette armurerie.

«  Je ne veux rien de tout ça. Juste un fouet pour entraver les autres. Si je voulais leur faire du mal, j’aurais certainement demandé une épée, comme tout le monde. »

Le sourire de Maxine se fit définitivement moqueur, cette fois-ci. Effectivement, l’imagination de Prima n’était définitivement pas tordue si la vestale imaginait une épée comme le seul moyen de faire du mal à quelqu’un. Elle était si naïve… Et pourtant elle semblait déterminée à ne par ressortir de la boutique sans la promesse que Maxine se chargera bien de la confection de son fouet même si la fille de Vulcain pouvait voir à quel point elle était mal à l’aise.

L’armurière savait qu’elle aurait du dire non, ne pas donner la moindre chance à une ennemie —  enfin une « opposante » — des Chimères dont elle faisait plus ou moins partie et dont elle gardait l’entrée de leur repère. Mais la tentation était bien trop forte. Si la vestale savait le nombre de Chimères qui se la coulait douce dans son sous-sol en ce moment même, elle ferait sûrement une syncope sur place.

Toute cette situation était beaucoup trop amusante pour Maxine qui décida enfin de mettre fin au supplice de Prima qui attendait sa réponse en soutenant son regard depuis tout ce temps. L’armurière était tout de même impressionnée par tant de détermination. A vrai dire, Prima avait gagné son respect durant cet échange. Maxine se décida donc enfin à répondre à la vestale.

«  Bon. Très bien. Tu auras ton fouet qui ne sert pas à faire mal et… tes menottes. »

Le soulagement de Prima se lut directement sur son visage ce qui fit lever les yeux au ciel à Maxine. Tout ce cinéma pour avoir l’air d’une dure à cuire et elle laissait tomber le masque si facilement… ce n’était décidément pas comme ça qu’elle allait devenir la justicière de la Nouvelle-Rome.

Enfin, ce n’était pas comme si Maxine en avait quelque chose à foutre, finalement.

«  Repasse d’ici deux ou trois jours. Vu qu’il n’y rien de spécial à créer dessus, ça devrait être vite réglé. »

Maxine, toujours parée de son air blasé, avait cessé de sourire pour se contenter d’afficher son indifférence habituelle alors qu’elle inscrivait la commande de Prima dans son carnet.

Un fouet qui ne faisait pas mal… vraiment on aura tout vu.

Lorsque Maxine accepta finalement la requête de Prima, celle-ci eut l’impression que toute la pression accumulée venait de retomber. C’était faux. Si son visage et sa posture étaient un peu plus détendus, le reste de son être voulait toujours s’enfuir de cet endroit. Elle n’aimait toujours pas Maxine, seulement, elle était rassurée de savoir qu’elle avait enfin trouvé une personne acceptant d’armer une vestale.

Maxine intima à Prima de revenir dans quelques jours, ce à quoi Prima répondit par un hochement de tête et un sourire, suivis d’un remerciement. Malgré la peur qu’elle ressentait, Prima savait que Maxine ne pouvait pas être une personne fondamentalement mauvaise, elle méritait elle aussi de la reconnaissance. Sans plus attendre, Prima lui souhaita une bonne journée tout en la remerciant une dernière fois, et lui tourna le dos pour sortir de cette armurerie.

Au moment de passer la porte, celle-ci s’ouvrit juste devant Prima, qui s’écarta pour laisser passer trois personnes. Une femme et deux hommes. Pas n’importe lesquels. Prima reconnut sans aucun mal la centurion de la cinquième cohorte, Raemilia. L’une des personnes qu’elle suspectait le plus d’être une Chimère, sans en avoir la moindre preuve pour autant. Les deux hommes à ses côtés devaient être Solan et Kieran, ses plus proches alliés. Ce trio était mille fois plus terrifiant que l’armurière, ce qui força Prima à revoir entièrement son jugement. Maxine n’était vraiment pas méchante, juste une peu froide. Elle se demandait si les trois Chimères potentielles qu’elle venait de croiser avaient une part de bonté en eux, eux aussi.

Malheureusement, Prima ne pouvait pas rester pour les interroger. En vérité, il fallait qu’elle se fasse aussi discrète que possible. Sans être remarquée, elle se faufila par la porte entrouverte qui se referma derrière elle. Elle ne voulait pas que sa commande d’arme ne se sache avant que ce ne soit fait, sans quoi tout pouvait encore être annulé.

Une fois à l’air libre, Prima put enfin respirer correctement. S’armer était une chose bien plus dangereuse que prévue, mais il fallait qu’elle aille jusqu’au bout. Maintenant qu’elle était assurée d’avoir une arme, il lui fallait se trouver quelqu’un pour lui enseigner les bases. Elle avait encore du pain sur la planche avant de pouvoir faire face aux Chimères.