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Hands full of flowers [Roman/Cass]
 :: Camp Jupiter et Nouvelle-Rome :: Le Champ de Mars
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Re: Hands full of flowers [Roman/Cass]



Une. Deux. Une. Deux. Une. Deux. Cassandre avait callé le rythme de sa marche sur celle assurée de Roman, sur la musique que faisaient leurs vêtements en se frôlant ou le sable et la terre meuble sous leurs souliers. Il savourait la sensation de la sentir se modeler en une fraction de seconde jusqu’entre les crans de ses semelles et se faire semblable à l’empreinte de ses pieds, les fourmillements que cela faisait naître sur sa langue ou tout au bout de ses doigts. Inexplicable, bizarre, addictif. La mélodie de leur chemin tapissait sa Brume, la berçant calmement, enfouissant le flot des questions, refermant momentanément le barrage retenant sa peur. Momentanément oui. Car il n’y avait rien qui pouvait l’empêcher définitivement de croire que le seul Roman qui resterait dans sa vie après ce déjeuner serait celui de ses souvenirs. Mais à chaque nouvelle mesure qu’ils composaient l’un à côté de l’autre, Cassandre se réjouissait que cet instant dure quelques croches de plus. La mélodie qui les transportait ne pouvait le rendre optimiste, mais elle lui laissait des pauses, des respirations, des points d’orgue à peine assumés pour l’observer. Imprimer furtivement les épis impétueux à l’arrière de son crâne dans les vagues de ses boucles, le duvet à la jonction de ses cheveux et de l’arrête de sa mâchoire inférieure, le balancement irrégulier de la garde de son gladius à sa hanche comme s’il jouait à contre-temps, sa peau blafarde à peine visible entre les manches larges et les poches de sa veste toute neuve, l’absence du haut reconnaissable du Camp Jupiter, la taille presque égale de son torse et de ses jambes, et ses épaules légèrement penchées vers l’avant. Il regardait droit devant lui, comme s’il savait parfaitement où aller, où marcher, comme si c’était le monde qui roulait sous ses pieds et qu’il ne déployait pas le moindre effort. Cassandre regardait les siens et les cailloux qu’il prenait soin d’éviter, les fleurs et les brins d’herbe qu’il regrettait d’aplatir de tout son poids, les lignes invisibles des craquelures de l’univers sur lesquelles il refusait de marcher. Quelle que soit la destination, Cassandre lui faisait entièrement confiance.

Les bruits de la ville puis les pavés, les odeurs et la chaleur qui régnaient au Camp avaient peu à peu remplacé la nature. La chanson de leur route s’était mêlée à la cadence soutenue de ce nouvel orchestre, avait résisté quelques mètres pour se perdre dans le chœur. Ce n’était pas violent, ils étaient arrivés lentement, passant les portes, empruntant les ruelles les moins encombrées, mais le barrage interne de Cassandre menaçait déjà comme s’il avait été enfoncé à coup de bélier. Ses yeux remontaient plus régulièrement vers Roman, de crainte qu’il ne se volatilise dans la foule, ou que quelqu’un ne piétine le lien invisible que Cassandre voyait en franchissant la rue entre leurs deux épaules désynchronisées.

« Pourquoi tu es toujours si seul ? Je veux dire, la vraie raison. »

Roman l’avait pris de court. Le silence qui les avait accompagnés jusque-là lui avait presque fait oublier le son de sa voix. Avait-il même vraiment parlé ou Cassandre n’avait-il pas déjà commencé à nourrir son avatar de Brume d’un semblant d’indépendance ? Roman n’avait pas même fait mine d’attendre sa réponse, le laissant planté à l’entrée du Mess tandis qu’il se rendait sans la moindre hésitation entre les légionnaires. Cassandre l’avait suivi des yeux la mâchoire prête à se décrocher si quelqu’un le bousculait. Roman était un poisson dans cette marée de voix et d’énergies. Un oiseau plus exactement, de ceux capables de retenir leur souffle pour plonger sous la surface et de s’y mouvoir avec une fascinante agilité. Comme si tout ce monde glissait sur ses plumes sans jamais véritablement l’affecter. Au sein même du bassin, sans y appartenir. Regardant les autres Romains tant comme des proies, des menaces ou de simples obstacles à sa course. C’était cette forme d’assurance qui attirait l’œil de Cassandre, rendait ses couleurs plus vibrantes. Celle de n’avoir rien à faire parmi les autres sans pour autant jamais perdre de vue la surface entre le ciel et la mer, de se fondre dans la masse en une fraction de seconde, se faire invisible, mais sans jamais s’oublier, se prélasser dans ces eaux tumultueuses sans que jamais ses plumes ne l’empêchent de s’envoler d’un battement d’ailes. Peut-être lui-même n’en avait pas conscience. Une habitude si ancrée qu’un tel talent lui semblait la plus basique des choses, mais aux yeux de Cassandre, cela rivalisait avec les arcanes de sa mère. Et l’observer tressait sa Brume du bleu acide de la jalousie, du violet profond de son admiration et de l’azur mat d’un certain calme intérieur.

Lentement, avec prudence ou incertitude, il s’était décidé à franchir la surface de ce lac. Il pouvait s’y noyer si facilement, mais à défaut d’en avoir, les ailes de Roman, le rendaient téméraire. Empruntant le même chemin, s’arrêtant pour éviter le courant et la faune sauvage, les yeux à la fois partout et nulle part, il avait rejoint le jeune homme. Celui-ci était déjà assis, impatient peut-être même. Cassandre voulait s’excuser une fois de plus. Mais risquer d’éveiller la voix sèche du légionnaire lui semblait pire encore que de boire la tasse en le rejoignant. Il n’avait donc pas beaucoup réfléchit en s’asseyant face à lui, tournant le dos à la majeure partie du Mess, se défaisant maladroitement de son sac, gardant son manteau telle la peau du lion de Némée.

« La vraie raison ? »

Les pensées avaient du mal cette fois. La Brume se parasitant déjà de bouts disparates des conversations qui les entouraient, des bruits de vaisselle, des éclats de rire lointains, d’images de Roman incomplètes tel qu’il se tenait face à lui.

« Je ne crois pas que j’ai vraiment le choix. » Ses mots s’accordaient enfin à la vitesse de ceux de Roman tandis qu’il s’efforçait de répondre au mieux, faisant la compétition pour savoir qui des deux tomberaient le plus bas ou le plus lentement. « Ça ne me dérange pas, je pense, les gens sont compliqués et tellement paradoxaux parfois. Je préfère les animaux, eux ne mentent pas ou ne passent pas par quatre-chemins pour te faire comprendre ce qu’ils n’apprécient pas. Y a des gens comme Ava, Niamh et Lou ou certaines chasseresses comme June, quand elles passent par ici, que j’aime bien et je crois que c’est réciproque, mais je n’ai pas de personne dont je sois proche comme peuvent l’être Clayton et Ava par exemple. Je pense que je ne saurai pas faire de toute façon, je me contente d’observer et de me poser un milliard de questions. »

Sa tentative d’humour avait fané sur son visage en évitant de s’assurer d’un coup d’œil à son interlocuteur s’il avait fait mouche. Il se connaissait suffisamment bien pour ne pas avoir de tels espoirs.

« Et toi ? Désolé si c’est indiscret ou pas correct, mais je t’avais déjà vu avant, hors des mardi matin je veux dire, et tu avais quelqu’un, une Ava à ton Clayton. » Voilà ce qui arrivait lorsqu’il ne réfléchissait pas avant de parler. Il découvrait les phrases qui sortaient de sa bouche en même temps que Roman et celle-ci sonnait particulièrement mal. Il n’avait pas besoin de voir sa Brume ou le visage du légionnaire pour savoir que malgré le désordre inhabituel régnant dans sa nébuleuse, celle-ci devait se teinter d’un embarras d’un beau orange vif inratable. « Euh… Je veux dire que tu étais moins seul avant. Tu as fait quelque chose de mal pour que tes amis décident de ne plus en être ? » Il n’y avait pas de jugement dans ses paroles, pas de tact non plus, seulement une brûlante curiosité comme si ce qu’il avait traduit de la situation pouvait être la seule explication, dénuée de toute subjectivité morale.



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Re: Hands full of flowers [Roman/Cass]

Ici, dans la cohue et le bruit, je me sentais un peu plus vivant. Si je n’étais évidemment pas l’être le plus bruyant sur terre, j’aimais étrangement les espaces bruyants. Ceux où je pouvais m’isoler et me faire oublier. Dans le chaos de ces lieux mon esprit était tourné vers d’autres pensées, toute l’énergie qui émanait de ces espaces de socialisations me faisaient sortir du monde onirique. C’était mon moment de repos et c’est pour ça que je n’aimais pas parler pendant ceux-là. Paradoxalement, c’était aussi très éprouvant pour moi. Ici, ou ailleurs, le bruit impliquait l’expression des pensées les plus insolites et les moins intéressantes à prendre en compte. Horreur me faisait ceux qui parlaient pour ne rien dire, pire encore ceux qui s’exprimaient trop et trop vite. Avec du recul, je pense que c’est ce que j’aimais chez Cassandre. Par peur de dire, ou de trop en dire, il se censurait lui-même. Son embarras quasi-constant n’était qu’une autre manifestation du même mal être qui nous ronge tous. On pourrait penser qu’être au camp, parmi des gens qui nous ressemblent nous permettrait de nous sentir mieux. Parfois, c’est l’inverse qui se passe. On se sent encore pire. Pourquoi ? Quoiqu’il en soit nous sommes différents. La différence entraîne l’incompréhension et c’est cette même incompréhension qui nous afflige tous. Ceux comme Cassandre qui ne peuvent pas cacher leurs différences sont d’autant plus soumis à ce calvaire. Peu importe si nous sommes similaires ou pas sur certains points, nous restons des êtres à part entière et ça, c’est indéniablement la pire erreur qu’on peut faire dans ce monde. Les populaires ne sont finalement que ceux qui arrivent le mieux à se plier au moule des apparences, ceux qui se cachent le mieux. À y penser, ils sont ceux avec le sort le plus insoutenable.

« La vrai raison ? »

Je sentais qu’ici, Cassandre éprouvait ce même paradoxe. L’anarchie du Mess troublait sa brume qui désormais ne trahissait plus ses pensées mais celles de tous. Nous étions tous troubler ici, l’inhibition de cet endroit menait à bien son jeu. Dans le trouble, nous sommes amener à nous ouvrir. À montrer nos peurs et comment nous les gérons. C’est ça qui montre de quoi nous sommes réellement faits.

« Je ne crois pas que j’ai vraiment le choix. Ça ne me dérange pas, je pense, les gens sont compliqués et tellement paradoxaux parfois. Je préfère les animaux, eux ne mentent pas ou ne passent pas par quatre-chemins pour te faire comprendre ce qu’ils n’apprécient pas. Y a des gens comme Ava, Niamh et Lou ou certaines chasseresses comme June, quand elles passent par ici, que j’aime bien et je crois que c’est réciproque, mais je n’ai pas de personne dont je sois proche comme peuvent l’être Clayton et Ava par exemple. Je pense que je ne saurai pas faire de toute façon, je me contente d’observer et de me poser un milliard de questions. »

Pendant qu’il me parlait, je me suis surpris à fantasmer les rêves de mon nouvel ami. Étaient-ils doux ? Certainement pas. C’était assez rare que je pense à ce genre de choses. Ça m’a instantanément troublé. J’ai juste acquiescé à ses paroles.

« Et toi ? Désolé si c’est indiscret ou pas correct, mais je t’avais déjà vu avant, hors des mardi matin je veux dire, et tu avais quelqu’un, une Ava à ton Clayton. »

Le vide s’était creusé dans mon esprit tout à coup. Voilà que plus rien ne comptait. Je voyais se mouvoir face à moi des lèvres sans mots. Sa question s’emmêlait dans mon esprit comme un serpent vorace qui aurait balayé tout sur son passage. Mon regard fixe trahissait l’asphyxie de ma raison. Jusqu’alors personne ne m’avait jamais encore posé la question et peut-être que moi-même je ne me l’étais jamais posée. Pourquoi suis-je aussi seul ?

«  Euh… Je veux dire que tu étais moins seul avant. Tu as fait quelque chose de mal pour que tes amis décident de ne plus en être ? »

Si j’ai fait quelques choses de mal ? Qu’est-ce que le mal a à faire avec ça ? Est-il une raison suffisante pour justifier l’abandon ? Tout le monde finissait par partir. Le mal n’était qu’un concept étriqué inventé par les dieux pour nous guider sur le chemin de leurs envies. Il n’avait rien à voir avec la lâcheté des gens. C’était uniquement leur égoïsme et leur faiblesse d’esprit qui parlait lorsqu’ils prenaient la décision de partir. Si l’on partait, c’est que l’on avait plus rien à dire et perdre les mots c’était ça la faiblesse des Hommes.

Je crois que j’expérimentais à cet instant même cette faiblesse. Je n’avais rien à répondre à ça. Rien qui en valait la peine. Ma seule envie était de partir.

« Je… Je ne sais pas. Je crois que les choses sont ainsi faites, qu’il y a des gens qui partent quand d’autres arrivent. Pourtant, je me sens bien seul.  ».

C’était vrai. J’aimais la solitude, je la cherchais constamment. Pourtant j’aimais aussi Marian, sa présence, son odeur, ses mots. Il me manquait et des vagues de souvenirs de lui me remontaient. Désormais, c’était comme si le brouhaha n’avait plus de place tant mes pensées résonnaient. Le monde tournait si vite, mon cœur s’emballait et ma respiration était devenue incontrôlable. Je me suis levé.

« Je… Je… Je crois finalement ne plus avoir très faim. Bonne journée.  »

J’ai filé à travers le Mess.
Cassandre Torrance
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Re: Hands full of flowers [Roman/Cass]



Cassandre avait fixé le visage de Roman, curieux de ce que celui-ci pouvait répondre. L’excitation venait de monter, celle d’apprendre à le connaître, de concrétiser les fils entre eux, et la Brume s’était enfin mise à construire la bulle qui les protégerait du monde. Il avait dévoré des yeux son buste s’affaisser sur son siège, ses yeux fixer dans le vide ou la table qui les séparait, ses sourcils chercher ses mots, la ligne de ses mâchoires se durcir tandis que ses phrases hésitaient. Cassandre avait scruté ses lèvres pour y lire sa réponse, la détacher du mieux possible de brouhaha ambiant qui parasitait ses oreilles et il s’était apprêté à lui demander de répéter au moment où Roman s’était levé pour disparaître hors du Mess. Cassandre s’était ensuite fait engloutir dans sa Brume lorsque les mots de Roman avaient enfin trouvé leur sens dans son esprit. Et seulement là, il avait viré dans un cyan caustique. Que venait-il de faire ? Incapable de réfléchir, bousculé par les bouts de conversation et les images qui s’infiltraient malgré lui dans sa nébuleuse, son cerveau s’était immédiatement vidé. Une immense étendue abandonnée sous un dôme à l’extérieur duquel le monde s’écroulait. Il était planté dans ce désert mental, laissant les pensées glisser hors de sa portée, velléitaire, inepte et impuissant.
Envahi des moqueries, au beau milieu des piques et des visages dégoûtés des autres légionnaires, rien n’était plus terrible que Roman filant à travers le Mess. Il était resté immobile ; même ses yeux avaient cessé de cligner ; comme s’il avait été mis en pause et que le reste continuait de tourner à pleine vitesse. Sa Brume avait gonflé, plus il se faisait statue, et inondé les autres tables de sa puanteur opaque et colorée. Sous les protestations des autres et leurs insultes à peine voilées, ils avaient peu à peu quitté les lieux comme on fuit un pestiféré.

Le reste de la semaine avait été compliqué. De jour comme de nuit. Les journées du fils de Trivia étaient encombrées de ses souvenirs et de tous les scénarios qui auraient pu subvenir. Son sommeil l’était par son absence ou les rares heures troublées de visages déformés et de scènes inédites. Il avait fallu plusieurs heures pour le déloger du bâtiment qu’il avait condamné et plusieurs jours de plus pour qu’il se décide à envoyer un message iris à June. Samedi 9 heures. En pleine mission au service des dieux, à l’autre bout du pays, il avait dévisagé la porte fermée de sa chambre sans broncher en attendant qu’elle puisse lui parler sans danger. Samedi 18 heures. Il avait laissé sa Brume faire état de la situation, ne se retenant pas pour camoufler la moindre chose, défilant comme un film sur le mur blanc derrière son lit. Avec elle, même à plus de trois mille kilomètres de distance, il se sentait particulièrement en sécurité. Depuis le fin fond de l’Ohio, elle n’avait pas pu être d’une quelconque aide pour décrypter les réactions de Roman cependant elle avait pris le temps de lui expliquer que si sa question n’avait fondamentalement rien de méchant, la formulation laissait grandement à désirer et que quelque soit la raison qu’avait eu Roman de partir, il était important que Cassandre aille lui présenter ses excuses. Elle s’était également assurée qu’il promette de ne pas oublier un repas de plus et de reprendre ses routines. Le dire et le faire étaient deux choses bien distinctes, mais qu’il s’en rende compte était déjà une progression conséquente. Ils avaient passé une grande partie de la soirée à discuter de la quête de la chasseresse, de ses exploits et à mettre au point un plan qui ne pétrifiait pas Cassandre d’angoisse. Il était tombé de fatigue, laissant le soin à la servante d’Artémis de mettre fin au message iris tandis qu’il l’emportait avec lui dans ses rêves mouvementés. Il avait passé cette nuit-là à imaginer toutes les options où ce plan pouvait échouer, pour s’assurer de les voir venir d’assez loin pour les éviter le jour J ou pour en exorciser  les craintes. Puis il avait attendu mardi matin.

Mardi 6 heures. Petit-déjeuner et préparation. Mardi 7 heures. Routine dans l’ordre, méticuleusement. Mardi 7 heures 30. La douche la plus expéditive de sa vie. Mardi 8 heures. En route pour l’entraînement. Roman n’est pas à son baraquement. Tant mieux. Ce n’était pas prévu. Mais il est sur le terrain lorsque le groupe arrive et l’entraînement démarre. Pas maintenant pas encore. Ne pas adresser un mot, un regard, ne pas s’approcher. Pas tant que les excuses n’auront pas été prononcées. Pas tant que Cassandre ne saura pas ce que pense Roman. Mardi 11 heures 30. Fin de l’entraînement et le légionnaire lit près de l’arbre comme la dernière fois. Cette fois Cassandre ne le quitte pas des yeux des fois qu’il se mettrait à se lever et à filer. C’est lui qui se lève, son sac par-dessus l’épaule, et qui file à travers les autres Romains. Ses pas ne sont pas assurés. Il s’avance lentement, suffisamment pour pouvoir bifurquer l’air de rien au moindre signe que le plan risque d’échouer. Roman ne se volatilise pas et Cassandre se retrouve devant lui, surplombant son livre. Que lit-il ? Ce n’est pas le moment. Les épaules du garçon sont remontées jusqu’aux oreilles d’appréhension et il prend une inspiration étriquée avant d’ouvrir son sac pour en sortir deux grosses boîtes de verre remplies de sandwichs copieux. Tranches de pain de seigle, beurre salé, rôti de bœuf, œufs aux plats, truite fumée, concombre, betterave marinée, oignons rouges et jaunes, pommes de terre, avocats, rondelles de citron, herbes aromatiques, Roman ne saura jamais le temps qu’il lui aura fallu pour confectionner ces boîtes malgré l’aide des cuisines. Faire un choix, imaginer ce qui pouvait lui plaire, voilà qui lui avait semblé pire que le pétrin dans lequel était June lorsqu’elle avait suggéré l’idée. Il n’avait finalement pas choisi et opté pour trois types différents de smørrebrød.

« Bonjour Roman, je voulais te dire que j’étais désolé pour la semaine dernière. Je ne voulais pas te blesser ou te fâcher, c’était extrêmement maladroit de ma part et je te prie d’accepter mes plus sincères excuses. Ma mère n’aime pas que je le dise, mais il se trouve que je suis autiste. Ce qui implique que j’aime bien avoir des plannings très réguliers pour ne pas oublier de faire des choses comme manger, que je suis incapable de savoir si tu m’apprécies ou non et que très souvent, je dis des choses que je regrette parce que ça ne sort pas avec la bienveillance que je voudrais. Ça n’est pas une excuse pour autant, alors j’ai préparé des smørrebrød, c’est un plat de chez moi pour ne pas à avoir à aller au Mess aujourd’hui. »

Ses bras fatiguent légèrement sous le poids des boîtes qu’il tient toujours loin devant Roman. Ses yeux ne le fixent plus depuis qu’il les a sortis. Ils sautent d’un point à l’autre sans pouvoir réellement se poser, ni dans ceux de son interlocuteur qui lui brûlent la rétine, ni dans les racines de l’arbre qui le ferait passer pour un menteur ou un malpoli. L’intérieur de ses joues désespère d’un peu de tranquillité, mais ses dents cherchent farouchement comment évacuer le trop-plein d’émotions qui monte telle la marée dans son ventre.

« Pardon, je voulais dire : est-ce que tu veux les manger avec moi quelque part qui ne serait pas le Mess ? »



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Re: Hands full of flowers [Roman/Cass]

La fragilité de mon égo ce jour-là m’avait rappelé à quel point il était difficile d’ignorer la souffrance. On pouvait bien tenter de faire comme si elle n’existait pas, chaque jour l’obscurité nous guettait attendant le moment opportun pour nous envahir de ses ténèbres. Nous étions des êtres de lumière qui ne pouvaient s’épanouir que dans la chaleur. Même si je détestais ce genre de visions manichéennes, je devais bien avouer que les plus belles fleurs ne pouvaient éclore que sous les rayons du soleil.
J’avais passé ma semaine à m’inquiéter de la tournure qu’allait prendre ma relation avec Cassandre. Mon comportement ce mardi-là n’avait pas été approprié et ma lâcheté avait teinté mon âme d’un voile d’appréhensions que je ne pouvais contrôler. Je n’avais pas encore tout à fait guérit de ma relation avec Marian. À vrai dire, j’avais plutôt décidé de l’oublier en pensant que, comme moi, tout le monde allait l’ignorer. Parfois, je me disais que le monde serait plus simple si les choses étaient ainsi faites ; qu’à chaque fois que les gens se retournaient, ma simple existence s’évanouissait de leurs esprits. Au moins, je n’aurai plus à me soucier de blesser ceux que j’aime parce que je n’aurai plus personne a aimé. Plus personne qui ne pourrait se souvenir de moi, plus personne qui pourrait attendre quelque chose de moi. Je n’aurai plus à existé et je pourrai vivre simplement.

Inconsciemment, je crois que c’est aussi ce que j’avais essayé de faire avec Cassandre. J’avais passé ma semaine à tenter de l’éviter. Ce n’était pas très compliqué étant donner qu’il suivait à la minute près le même emploi du temps chaque semaine. Cependant, Mardi a sonné et je n’avais d’autres choix que de me présenter à l’entrainement. Priam ne me l’aurait pas pardonné. Je ne voulais pas le décevoir.

À ma plus grande surprise, Cassandre ne m’avait pas adressé la parole pendant toute la séance d’entraînement. J’essuyais encore une fois un échec pesant. J’avais sûrement dû être trop dur avec lui, à tel point qu’il avait décidé, comme tout les autres, de m’ignorer. Après l’entraînement, je m’étais installé au pied d’un arbre comme j’avais pour habitude de le faire. Cette semaine, je relisais l’Attrape-cœurs de Salinger. C’était un classique de la littérature américaine que j’affectionnais tout particulièrement. J’avais toujours été frappé par la façon dont l’auteur retranscrivait l’affliction de l’adolescent face à l’incompréhension de ses parents. D’aussi loin que je me souvienne, je m’étais toujours plus ou moins identifié à Holden. Un enfant de bonne famille qui n’a jamais su trouvé sa place et qui, envahi par ce besoin de reconnaissance, est partie à la dérive. La beauté de ce livre, c’était de voir que malgré la pression sociale qu’Holden subissait, il souhaitait à tout prix rester lui-même. Pour moi, c’était une ode à l’adolescence, un appel à la clairvoyance sur un monde où les problèmes de l’adolescence restent immuables mais surtout un réquisitoire contre la maturité. Si Holden ne voulait pas devenir adulte, moi je n'avais pas eu d’autre choix. Ma naïveté, je l’avais perdue bien avant l’errance. Peut-être était-ce là la différence qui est à faire entre nous deux.

« Bonjour Roman, je voulais te dire que j’étais désolé pour la semaine dernière. Je ne voulais pas te blesser ou te fâcher, c’était extrêmement maladroit de ma part et je te prie d’accepter mes plus sincères excuses. Ma mère n’aime pas que je le dise, mais il se trouve que je suis autiste. Ce qui implique que j’aime bien avoir des plannings très réguliers pour ne pas oublier de faire des choses comme manger, que je suis incapable de savoir si tu m’apprécies ou non et que très souvent, je dis des choses que je regrette parce que ça ne sort pas avec la bienveillance que je voudrais. Ça n’est pas une excuse pour autant, alors j’ai préparé des smørrebrød, c’est un plat de chez moi pour ne pas à avoir à aller au Mess aujourd’hui. »

Il ne m’avait pas oublié finalement. J’ai esquissé un sourire, levé les yeux de mon livre. Je l’écoutais, avec toute la patience et la douceur qu’il méritait. Ma lenteur, presque maladive, bien qu’agréable, me permettait de dissocier chacun de ces mots de la brume qui s’amusait à trahir son esprit. Ce cadeau donné par son ascendance divine était sûrement ce que je détestais le plus chez Cassandre. C’est peut-être aussi pour cela que je l’appréciais tant parce que je détestais ce qu’il n’avait pas choisit d’avoir ou d’être. Rien d’autre.

« On fait tous des erreurs de jugements. Même les neuro-typiques comme moi. D’ailleurs, je ne crois que c’était une erreur. C’est plutôt moi qui devrait m’excuser pour mon comportement de la dernière fois. Je n’aurai pas dû partir, c’était déplacé. Tu ne pouvais pas savoir que je n’avais pas envie de parler de ça. Moi aussi d’ailleurs je ne le savais pas.  »

Comme à mon habitude, chaque mots je prononçais étaient comme décortiquer comme si j’attendais qu’uns à uns, ils tombent sur mes genoux en tailleurs pour pouvoir prononcer le suivant. J’aimais prendre mon temps. C’était le seul cadeau qu’on m’avait jamais fait : le temps. Il était un ami fidèle, bien qu’incertain, je savais qu’il filait toujours droit et qu’il n’irait jamais dans un autre sens. Je savais surtout que le temps guérissait tout. Pourtant, je commençais à comprendre maintenant que le temps était aidé par les autres. C’était eux qui réellement influençaient sur nos blessures, le temps ne faisait que nous apporter ces gens et c’était à nous d’accepter ces cadeaux.

« Pardon, je voulais dire : est-ce que tu veux les manger avec moi quelque part qui ne serait pas le Mess ? »

« Avec plaisir. C’est une belle journée pour un pique-nique.  »
Cassandre Torrance
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Re: Hands full of flowers [Roman/Cass]



Il ne s’était pas fâché. Il n’était pas non plus resté de marbre et Cassandre ne savait si cela s’avérait de bon ou de mauvais augure. Roman était incroyablement difficile à lire. Ni complètement absent ni complètement là, perdu dans des pensées invisibles ou dans d’autres mondes intangibles, s’ornant d’une langue de regards et de non-dits, voyageur sans réel foyer ou enfant éternellement insatisfait ; solitaire quoi qu’il arrive. Cassandre ne pourrait jamais le suivre sur les routes qu’il semblait seul à voir et emprunter. Cassandre, pour qui la Brume n’avait presque plus de secrets, mais qui ne pouvait voir derrière le voile où Roman vivait. Roman, qui semblait plus appartenir aux fantômes qu’à la réalité, aux rêves qu’aux vivants, et qui l’inquiétait presque autant qu’il souhaitait partager ce déjeuner en sa compagnie.

June avait eu raison ; comme toujours ; les excuses avaient semblé fonctionner et le cadeau de paix également. Mais ses instructions s’arrêtaient là. À aucun moment, il avait pensé à lui demander la suite du plan que devrait-il se passer une fois que les choses seraient apaisées avec Roman. Peut-être s’était-il imaginé qu’après sa tirade, les Parques auraient noué les fils de son destin, ellipsé sa vie et qu’il serait passé directement au soir, au lendemain ou même plusieurs mois plus tard alors qu’ils seraient bons amis. June n’avait rien dit non plus sur Roman lui retournant ses excuses. Les refuser était-il irrespectueux ? Les accepter pouvait parfois lui attribuer l’étiquette de l’insolent. Ne rien faire ? Se contenter de sourire de gêne. Hocher la tête avec compassion, tendresse même. Accueillir ses mots plumes et diamants avec délicatesse, leur laisser la place de virevolter dans l’air. Se faire témoin et non acteur. L’observer, calmement, sans à-coups, sans bruit, comme un animal. Se faire terre meuble sous ses pieds. Attendre qu’il donne un signe, qu’il l’attrape et le tire sur les planches, qu’il l’y invite de gré ou de force à jouer un rôle dans cette scène. L’admirer évoluer, bouger, s’ajuster, trouver sa respiration, lire ses mots sur ses lèvres et l’intérieur de son crâne sur ses sourcils ou sur l’alignement de ses épaules. Se faire élève, apprenti, curieux et attentif, la bouche sèche et l’envie de boire, d’apprendre, de grandir, ou d’un jour se faire son égal. Envisager que cela soit possible.

C’est une belle journée pour un pique-nique.

Cassandre s’était assis à l’endroit même où il était venu s’excuser. Ses jambes s’étaient croisées sous lui pour toucher le sol de ses genoux, de ses ischions, du dos de ses mains, et se retrouver là où il se sentait le plus à l’aise : connecté à la terre, sous les yeux de Roman. Consciencieusement, il y avait déposé la boîte et s’était affairé à sortir de son sac tout ce qu’il a prévu. Comme lancé sur un script, il déposait, sans se précipiter mais sans jamais arrêter le mouvement, les serviettes à carreaux, les assiettes, les couverts, les verres et l’eau, ainsi que le reste des boîtes de préparation. Il n’avait gardé dans son sac que le strict minimum : quelques herbes en sachets, des petits flacons de verre, quelques cailloux, coquillages et plumes, ses pierres de rune et les calendula cueillis le matin même sur le chemin. Tout le reste avait laissé la place à ce déjeuner sur l’herbe. Faire des choix était de loin le plus difficile de toute cette entreprise. Il craignait par dessus tout que Roman ne trouve pas son compte dans ce qu’il avait pu ramener. June avait pourtant assuré que si cela s’avérait être le cas, le Romain aurait suffisamment de politesse pour ne rien en dire et accepter l’aventure de ces goûts... rustiques. Mais cette idée-même ne le rassurait pas.
C’était sa deuxième chance. Déjà bien plus qu’il n’avait pu accorder ou recevoir dans ses habituelles tentatives d’intégration. Il ne souhaitait surtout pas gâcher une telle opportunité de laver ses erreurs. Les questions ne cessaient de fuser tandis qu’il s’interrogeait sur ce qu’il pouvait bien se passer derrière les yeux du légionnaire. Parfois, le don de sa mère lui semblait bien injuste. Elle lui avait accordé de faciliter la compréhension des autres envers lui-même : qu’y avait-il de plus facile que de lire dans sa Brume pour le comprendre ? Mais c’était comme si, même les dieux négligeaient parfois que les mortels ne jouissaient malheureusement pas des privilèges de leur famille divine, et que Trivia avait oublié une partie de la communication. Partie qui lui semblait pourtant tellement essentielle et qui lui faisait si cruellement défaut. Eux pouvaient savoir qui il était, comment s’adresser ou se positionner en une minuscule palette de couleurs. Lui restait aveugle et sourd, noyé dans l’angoisse et l’effroyable peur de l’échec. Il aurait voulu que les rôles s’inversent. Lui spectateur omniscient, eux vagabonds craintifs. Il voulait savoir. Plus que cela, il en ressentait un besoin presque vital et insatiable de savoir, comprendre, connaître pour seulement après se sortir de sa paralysie. Mettre le monde sur pause le temps d’y lire le moindre reflet d’atome dans l’air avant de s’y retrouver brutalement exposé. Toujours trop lent. Le temps ne cessait de lui filer entre les doigts. Qu’il se dérobe dans ses souvenirs, emportant des bouts entiers de sa mémoire, qu’il vole les heures de ses journées ou de ses nuits, le faisant sauter de semaines en mois sans continuité, ou qu’il le renvoie sans cesse dans le passé pour lui apporter bien trop en retard les émotions qu’il aurait dû y ressentir, les choses qu’il aurait dû y dire, les gestes qu’il aurait dû y faire. À ses yeux, le temps n’avait jamais été une ligne droite, fluide, intransigeante, mais une tornade lunatique, autoritaire qui l’envoyait constamment se perdre dans ses vents comme une machine à laver lancée à pleine vitesse. À côté de cela, Roman semblait irréel. Les enfants de Saturne n’existaient pourtant pas. Comment fait-il ? Qui est-il ? Je veux comprendre. J’ai besoin... Pas trop vite.

« Alors, je ne savais pas trop ce qui pouvait te plaire et je n’ai pas trouvé qui pouvait me renseigner là-dessus dans le coin du coup y a beaucoup de choix : option viande avec du rôti de bœuf, option poisson avec de la truite et option végé avocat-pommes de terre. Après, globalement c’est des assortiments de saveurs un peu acide, mais très fraîches. Les cuisines du Mess sont très bien mais ça fait très longtemps que je n’ai pas fait de smørrebrød donc ne t’attend peut-être pas à une révolution culinaire. Tu échappes donc de peu à la terrine de rennes, au phoque mariné ou au mergule nain frit. »

Ces spécialités ne venaient pas de chez lui, mais d’encore plus au nord, mais cela Roman ne pouvait pas le savoir et le plaisir de vivre dans une culture si étrangère résidait dans les expressions de dégoût ou de profond étonnement sur les visages de ces Américains. Cassandre était fier de sa blague et guettait ce visage avec anticipation. S’il fallait éviter comme la peste tout ce qui pouvait se rapporter de près ou de loin aux liens que pouvait entretenir Roman, le faire le sourire aux lèvres ne pouvait pas faire de mal.



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Re: Hands full of flowers [Roman/Cass]

Cet instant, comme coincer dans l’éternité, n’était qu’un petit aperçu du bienfait de la présence de Cassandre à mes cotés. Je pouvais rester comme ça, observant ses sempiternelles habitudes, contemplant tout le rituel de sa vie. Je pouvais m’accommoder des images que formaient sa brûme, celles qui, contre-lui, manifestaient toute l’exigence de ces gestes. J’aurai seulement aimé que le temps passe un peu moins vite. J’aurai voulu ralentir la course de Saturne pour pouvoir l’observer un peu plus longtemps.

Qu’il était bon d’avoir un ami sur lequel se reposer de temps à autres. Qu’il était reposant de voir la dévotion de Cassandre à prendre à cœur tout ce que je ressentais sans jamais savoir ce qu’il en était réellement. Il me connaissait à peine et pourtant, il avait cette passion ardente, cette volonté intarissable, cette bienveillance qui m’était encore inconnue, toutes ces qualités que j’appréciais chez lui.

Vous savez, lorsqu’on passe notre existence à errer dans l’esprit des gens, on vient à penser qu’on a plus de raisons d’exister. C’est le propre des rêves de s’évanouir dans la nuit et de n’exister que pour et par le rêveur. Ces rêves nous aident à comprendre l’étrangeté du monde et de notre esprit. Ils n’ont donc pas besoin d’être apprécié ou secouru, pas besoin d’être commémorer ou retenu. Tout ce qu’on veut c’est qu’ils nous guident, nous permettent d’arriver à termes. Puis un jour l’espoir se perd et nous abandonnons nos rêves improbables, corrompus par l’accablement d’un monde cruel où ils ont peu de chances de se réaliser ou compromis par la facilité de rêver ailleurs mais plus petit. Perdant face à l’incommodité de ce qui faisait de nous des êtres d’innocence, ces rêves sont perdus, jetés à la poubelle et pour la plupart oublier. J’étais comme l’un de ces rêves que je viens de vous décrire. Je n’étais jamais assez beau, jamais assez bien pour être gardé, jamais assez accessible pour être appréhendé. Pourtant, dans les yeux de Cassandre, dans sa candeur, j’avais retrouvé la valeur que j’avais autrefois cru avoir pour quelqu’un.

« Alors, je ne savais pas trop ce qui pouvait te plaire et je n’ai pas trouvé qui pouvait me renseigner là-dessus dans le coin du coup y a beaucoup de choix : option viande avec du rôti de bœuf, option poisson avec de la truite et option végé avocat-pommes de terre. Après, globalement c’est des assortiments de saveurs un peu acide, mais très fraîches. Les cuisines du Mess sont très bien mais ça fait très longtemps que je n’ai pas fait de smørrebrød donc ne t’attend peut-être pas à une révolution culinaire. Tu échappes donc de peu à la terrine de rennes, au phoque mariné ou au mergule nain frit. »

Un sourire s’était dessiné sur mon visage. Un sourire qui ne voulait plus partir. Ce moment, je le chérissais. J’étais ce genre de personnes accrocher aux délicats et doux moments de l’existence. Ces détails que d’aucun trouve futile me permettait de relativiser sur l’humanité. Cassandre était une boule d’énergie positive, pure et soyeux comme le satin ou la caresse du soleil au matin. Il adoucissait mon âme et mes pensées funestes. Sans l’avoir même gouté, je savais que sa cuisine avait la saveur d’un souvenir éternel et réconfortant d’un après-midi passé aux cotés d’un ami.

«  Je te remercie pour toutes ces bonnes choses Cassandre.  » ai-je dis, prenant l’un des smørrebrød qu’il me proposait. C’était l’option végé. «  Vous mangez vraiment du rennes, du phoque et du mergule ?  » avais-je tenté de rebondir par simple curiosité, sans me permettre d’émettre aucun jugement de valeur.

«  C’est délicieux ! », me suis-je exclamer dès la première bouchée de smørrebrød. Je le pensais vraiment. « J’essayerai de te cuisiner quelque chose la prochaine fois. Je ne te promet rien d’extraordinaire. Je suis un piètre cuisiner. ».

Alors j’ai ris. C’était une sensation bizarre et réconfortante à la fois. Une expression que je n’exprimais que peu ou en tout cas plus avec autant de sincérités, surtout ces derniers temps.
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Re: Hands full of flowers [Roman/Cass]



La curiosité de Roman avait déclenché le rire de Cassandre. Sa blague était un franc succès à ses yeux. Et son rire était de ceux étranges qui ne se connaissent pas encore. De ceux qui ne sortent pratiquement jamais voir la lumière du jour, qui sont sur la fine ligne entre la gêne et la joie, qui sonnent trop fort ou trop intenses pour la situation. De ceux qui tordent maladroitement la bouche et qui résistent à moitié à montrer les dents, parce que la sensation est trop étrange. De ceux qui se sont fait de véritables nids à l’intérieur à défaut de pleinement s’exprimer et qui secouent les épaules comme de petits tremblements de terre. De ceux qui ne s’accordent que de rapides coups d’œil hors du sol par pudeur ou pour le plaisir de savourer cet instant de validation personnelle.

Ses yeux brillaient et ses joues se trahissaient de rose comme si sa Brume n’avait pas déjà amplifié le son de son rictus.  

« Non, non, non. Notre cuisine est sûrement plus farfelue qu’ici, mais elle ressemble énormément à celle des pays nordiques, du Danemark surtout. Après du phoque mariné, j’en ai déjà goûté une fois grâce aux bateaux marchands qui redescendent d’Islande à la mi-mai. Enfin "grâce"... J’ai pas aimé du tout. Ça fait mal aux dents et l’odeur reste dans le nez hyper longtemps. »

Quelque chose dans le fait de partager ses souvenirs avec tant de facilité, de laisser un bout de son monde percer à travers sa nébuleuse dans l’austérité du Camp, brûlait comme une petite flamme dans le ventre de Cassandre. Un sentiment étrange, mais certainement pas désagréable qu’il avait du mal à expliquer, mais dont il voulait savourer la chaleur. Était-ce parce que pour une fois, Roman et lui n’étaient plus des légionnaires, des soldats taillés pour un monde qui les laissait sur le bord de la route, qu’ils n’avaient plus à dépenser monstre d’énergie pour suivre la cadence ? Il avait l’impression que tenir sa tête hors de l’eau n’était plus si difficile un sandwich à la main et un ami pour le partager.
Ami. Ami. Ami. Ami. AmiAmi.
Pourquoi de tout ce à quoi il pensait, sa Brume avait-elle choisi de ne rester bloquée que sur ce mot ? Il avait enfoncé son smørrebrød au plus profond de sa bouche comme s’il pouvait étouffer la voix de ses pensées.
Contrairement aux autres demi-dieux, Roman semblait avoir la délicatesse d’ignorer consciemment le manque de tact de son fardeau. Ce qui lui donnait l’illusion qu’elle n’existait plus la plupart du temps. Sauf lors de ces moments-là où, contrariée, sournoise, violente, elle se vengeait en plantant ses griffes, presque démente, dans la chair des pensées qu’il s’évertuait à enterrer le plus loin possible. Comme un animal jaloux du manque d’attention que Roman pouvait lui accorder et qui venait imposer sa présence entre eux deux pour qu’on ne puisse plus l’ignorer. Sans la moindre pitié, sans la moindre empathie, sans la moindre envie d’y renoncer.

Entre ses mains crispées, son smørrebrød faisait pâle figure et se vidait peu à peu de ses entrailles. La truite fumée semblait reprendre vie et frétiller lentement pour rejoindre les flots. Puis faire un bond hors du pain de surprise en entendant Roman s’exclamer.

Son rire, ses mots, voilà qui prenait de court sa Brume qui s’était mise à tourner en boucle. Comme un million de minuscules Roman rieurs, une constellation cacophonique. Cassandre avait une fois de plus étranglé sa propre bouche sur son déjeuner, espérant peut-être suffoquer sa nébuleuse par là même. Mais une chose était sûre : cette scène venait de rendre le Roman qui viendrait tôt ou tard tourmenter ses nuits, un peu moins menaçant.

Ses mots en revanche mirent du temps à se frayer un chemin dans ce brouhaha. Sa réponse impliquait une prochaine fois. Il avait envie de réitérer ce moment de partage même si celui-ci venait à peine de commencer. Comment ?

Promis, je ne jugerai pas. Mais promets moi simplement de ne rien faire à base de Jello. Eurk, ça, c'est vraiment une invention du diable !

Il voulait rire avec lui. Il voulait passer un beau moment. Il ne voulait pas penser à la longue liste des choses qu'il redoutait de manger. Il ne voulait pas être bizarre à cet instant. Il voulait qu'organiser un pique-nique, s'inviter au restaurant ou passer l'après-midi à faire des gâteaux soit simple. Il voulait que rien ne vienne filtrer la lumière de cette idée.

Et franchement, ça ne peut pas être pire que passer les 3 dernières années ici à prendre toujours le même plat de pâtes au pesto ! Oui, oui, même au petit-déjeuner. Je plaide coupable !



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    Re: Hands full of flowers [Roman/Cass]

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