Chaud. Il s’arrête. Une chaleur à crever. La sueur goutte de ses cheveux, pique ses yeux, trempe ses vêtements. Les machines hurlent, les voix s’élèvent plus fortes encore. Il fait chaud. Tout grince, tout fait du bruit, tout brille, tout va vite. Une voix crie, plus forte que tout. Il tient le marteau d’un bras tremblant. Tout est moite. Son dos colle. Il tape. Encore, encore, encore. Les vibrations font trembler ses os. Ça fait mal. Vraiment mal. Une pierre chaude rencontre son bras fatigué. Il hurle. Le monde devient blanc, les bruits s’étouffent. Des larmes s’échappent. Les voix deviennent des ombres dansantes le surplombant. La voix, celle qui est plus forte que tout, s'approche. Crie. Parce qu’il ne faut pas pleurer, parce qu’il est un garçon, qu’il n’avait qu’à faire attention, parce qu’il n’est pas asse-

Clayton se réveilla dans un hoquet. Ses membres s’étaient sournoisement enroulés dans la couette. Ses orteils effleuraient l’oreiller. Son cœur battait furieusement contre ses cotes, soulevant rapidement son torse. Le petit roux se débarrassa de la couette en coup de pied, laissant son dos moite tremper les draps. Clayton frotta son visage humide, essayant de chasser les dernières bribes de son rêve. D’autres larmes vinrent remplacer les anciennes. Comme si son corps se liguer contre lui, profitant que la valve soit momentanément entrouverte. Traître. Exaspéré, Clayton fixa le plafond en frottant distraitement son avant-bras, se laissant porter par la tranquillité des lieux. Le ronflement de ses colocataires. Le vrombissement du réfrigérateur. Le craquement de la toiture. Le croassement lointain d’une grenouille. Dans un reniflement curieux, il expérimenta un sanglot, du bout des lèvres. Erk. Ok. Non. C’était définitivement bizarre de pleurer en faisant du bruit.

Quand son corps eux finit de se vider de la moitié de son eau, le jeune homme était inerte sur le lit. Dans un bâillement, il s’étira de tout son long. Qu’importe la fatigue, Clayton savait que le sommeil ne viendrait pas à l’emporter de nouveau. Alors, sans élégance, il roula hors du lit.

oOo

Clayton inspira profondément, remplissant ses poumons d’air salé. Le vent marin venait ébouriffer ses mèches rouges folles, laissant ses bras picotant de chair de poule. L’aire de jeu était - oh surprise - déserte. Après plusieurs tours de toboggan, une escalade au sommet de la pyramide de corde - ses jambes en tremblaient encore - Clayton opta pour la balançoire. Doucement, les orteils enfouis dans le sable, il se balança en regardant le soleil apparaître au-dessus de la mer.

Les vacances se terminaient paresseusement. D’ici quelques jours, le Club Mydh serait derrière lui. Égoïstement, il aurait préféré ne jamais retourner au Camp Jupiter. Pourtant, il n’avait aucune de regret. Ce fut un été placé sous le signe des expérimentions. S’amuser dans un parc aquatique - et d’attraction - pour la première fois de sa vie. Se teindre les cheveux en rouge vif. Boire assez d’alcool pour en vomir. Griller des marshmallow dans un feu de camp. Ce fut l’été de ses 18 ans. Ses parents avaient insistés pour le voir, pour lui organiser une soirée d'anniversaire et ça avait été... sympathique. Vivable. Plaisant.

Et finalement, ce fut un été souligné par une amitié inattendue. Jamais il n’aurait cru que son obsession intrigué pour sa Centurion se transformerait en amitié. Une amitié chaotique et sincère. Clayton se surprenait désormais à rechercher sa présence, non plus pour l’ennuyer, mais pour passer du temps avec elle. Profiter de la compagnie d’Ava, amusante et sensible derrière sa carapace d’une froide neutralité. Le soleil l'éclaira de ses premiers rayons et le jeune homme décida d'immortaliser la scène. D’un geste, Clayton sortit le petit carnet de sa poche. La première page contenait cette petite photo d’eux. Il avait insisté pour garder la première, celle où Ava avait une moue surprise, légèrement ennuyée, avec ses cheveux aussi rouge que les siens. Parfaite.

oOo

“Oh, bonjour Clayton ! J’étais en train de préparer le petit-déjeuner. Tu as déjà mangé trésor ?”
“Pas encore.”

Clayton côtoyait les Crimsons avec autant d’aisance que s’il faisait partie du décor. Il s'était fait une place dans leur quotidien à force d'errer dans leur maison tel un gremlin égaré. Personne ne le chassait. Personne ne souhaitait le voir partir. Sauf Ava. Occasionnellement. Le matin. Ava qui disait le contraire de ce qu’elle pensait. Donc ça ne comptait pas vraiment comme un refus, décida-t-il. Elayne lui disait toujours d’entrer un sourire sincère aux lèvres. C'était aussi perturbant que plaisant. Clayton l’aida à finaliser le petit-déjeuner en discutant joyeusement de tout et de rien. Il finit même par lui montrer, dans un sourire timide, son croquis réalisé un peu plus tôt sur la plage.

Le temps qu’Ava émerge, Clayton grignotait une tartine assit sur le plan de travail. Ava avec ses longs cheveux bleus ébouriffés, son air agar dans son crop top et son short troué. Ava qui fronçait déjà les sourcils, agrandissant proportionnellement le sourire de Clayton.

“Pourquoi il est là ?”
“Clayton m’a aidé pour le petit-déjeuner.”
“Jus d’orange ?”

Ava le fixa. Clayton la fixa. Bleu ennuyé contre vert taquin. Ava finit par lui prendre le verre des mains en grommelant. Clayton quitta son perchoir pour s'installer près d’elle à table. Un petit-déjeuner baigné par les lueurs avancé du jour. À conter avec exagération sa 'rencontre' avec l'affreuse Crimson devant une Elayne hilare pendant qu’Ava souriait derrière son bol de chocolat chaud. Une matinée a regardé un Disney sur le canapé afin de réparer ton inculture, vu que tu n'es pas décidé à partir. Une matinée à rire, à sincèrement apprécier le Roi Lion et à regarder la bouche d’Ava réciter silencieusement le film. Ava qui connaissait par cœur toutes les chansons. Clayton finit par attraper la télécommande pour activer les sous-titres, chantant à tue-tête ses chansons inconnues. La matinée devient une journée. Clayton aurait voulu que l’été ne se termine jamais, mais il était ravi d’avoir été fidèle à ses paroles : ils s’étaient bien amusés au Club Mydh.