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(solo) All the feelings that I get but I still don't miss you yet
 :: La Nouvelle-Rome :: Zone nord
Ava-May Crimson
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Défaut fatal: Orgeuil
Ava-May CrimsonCenturion de la 5e cohorte
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(solo) All the feelings that I get but I still don't miss you yet

Ava serra la couette contre elle, emmêlant bras et jambes autour comme s’il s’agissait de quelqu’un. Peut-être, songea-t-elle, peut-être que si elle fermait très fort les yeux alors elle chasserait les mauvais rêves. Mais il ne s’agissait pas de mauvais rêves, n’est-ce pas ? Ava ne savait pas si elle avait envie de pleurer, de hurler, de frapper, de rire… Ava ne comprenait pas ce que son corps lui demandait en lui infligeant une balade dans ses souvenirs. Et pourtant, et pourtant…

Et pourtant, Ava a de nouveau sept ans. Elle a les joues striées de larmes, une épée en bois entre les mains, les phalanges rougies et les genoux écorchés.
« Si tu penses que ça me fait plaisir de faire ça, tu te trompes ! Relève-toi, maintenant. »
Mais Ava n’a pas envie de se relever. Elle ferme les yeux et serre ses bras contre sa poitrine. Peut-être que si elle priait assez fort, alors peut-être que la douleur cesserait. Peut-être que les choses iraient mieux ? Au lieu de ça, Ava se fait empoigner avec force.
« Ava, si tu veux une bonne raison de pleurer, je peux te la donner ! Alors tu te relèves et on reprend depuis le début ! »
Il y avait une colère froide dans les yeux de sa mère. Non… pas sa mère… la Commandante. Sa mère ne ferait pas ça. Sa mère lui cuisinait des gâteaux au chocolat et regardait des films avec elle. Sa mère lui achetait les plus jolis vêtements et lui brossait les cheveux. La Commandante, elle, la forçait à s’entraîner jusqu’à que son corps entier tremble, jusqu’à qu’elle ne tienne plus debout. Une mère ne ferait pas ça, non ? Alors Ava prend sur elle. Ava se relève. Peut-être qu’au lieu de prier pour que ça s’arrête, elle pourrait prier pour que ça soit moins douloureux ? Si elle pouvait juste éteindre ses émotions pendant ces entraînements alors peut-être que ça passerait plus vite. Il lui fallait juste se concentrer pour que la tristesse et la douleur disparaissent. Ça ne pouvait pas être si compliqué, non ? Si sa mère pouvait devenir la Commandante alors Ava pouvait bien devenir une combattante ?


Ava enfouit sa tête dans son oreiller, tentant par tous les moyens de faire taire la cacophonie de ses pensées. Elle serra les poings autant que ses dents dans l’espoir de ressentir quelque chose. Quelque chose d’autre que cette épée de Damoclès au-dessus de la tête, cette impression d’être face à la vague sans savoir à quel moment elle allait se briser sur le rivage. Ava qui avait appris pendant si longtemps à éteindre ses sentiments ne savait plus comment les rallumer…

… Mais elle n’avait pas besoin de les rallumer car jamais sa mère n’avait semblé si satisfaite d’elle ! Même la Commandante était moins désagréable. Ava n’avait qu’à visualiser un petit interrupteur dans sa petite tête d’enfant. Quand il était allumé, elle pouvait courir partout, elle pouvait crier, elle pouvait danser, elle pouvait rire, elle pouvait pleurer. Quand il était éteint, par contre, elle devait écouter sa mère et ne rien dire. Ava songeait à tout ça en fixant son reflet dans la glace pendant que sa mère lui brossait les cheveux.
« J’ai bien réfléchi Ava-May et je pense qu’il faut qu’on entraîne un peu tes pouvoirs. Tu es en retard par rapport à d’autres enfants. Tu as dix ans passés et qu’un seul pouvoir activé. Ce n’est pas comme ça que Lupa t'appellera, tu sais.
- Tata elle a dit que c’est ok de prendre son temps, tu sais. »
Ava ne savait pas pourquoi elle avait dit ça. Sa mère lui tira les cheveux plus fort en les tressant. Ava sentit les larmes venir les chatouiller les yeux mais ce n’était pas ses émotions. C’était seulement à cause des cheveux. Seulement ça. Il suffisait juste… d’éteindre le petit interrupteur.
« Tu as vu ta tante récemment ? demanda l’adulte en serrant un peu plus fort les cheveux de son enfant.  
- Maman, tu me fais mal, gémit Ava.
- Réponds-moi Ava, n’essaie pas de jouer aux plus malines. »
Le petit interrupteur ne marchait pas très bien aujourd’hui. Ava avait l’impression de sentir ses entrailles se contracter. Dans le miroir, son reflet ne dissimulait pas du tout la peur qu’elle ressentait. Et sa mère… Ava raconta sans détour sa rencontre avec Elayne la semaine précédente. De toute façon, sa mère l’aurait appris bien assez tôt. Elle finissait toujours par tout savoir. « Il n’y a aucun secret dans cette maison », répétait-elle lorsqu’elle sentait qu’Ava cachait quelque chose. « Jamais de secret. »


Ava changea de sens une fois, puis deux. Elle sentait les remous de sa tristesse venir lui chatouiller le bout des doigts. Frissonnait-elle à cause du froid ou à cause de l'irrémédiable tsunami qui s’approchait ? Lassée, la jeune romaine se leva. Elle laissa tomber les draps par terre et s’extirpa de son lit comme s’il s’agissait de son propre cercueil. Elle fit quelques pas puis sortit sur le balcon. Là, elle respira l’air matinal à grande inspiration.

1…
2…
3…
4…

« Cinq fois ! Ava, ça fait cinq fois qu’on recommence ! Fais des efforts un peu, Adrian n’a pas toute sa journée devant lui ! »
Ava serra les poings. Elle n’avait aucune envie de tester son pouvoir sur lui, songea-t-elle, un masque d’indifférence sur le visage. Mais elle n’allait pas sortir de cet entraînement tant que sa mère n’aurait pas obtenu ce qu’elle voulait. Ce n’était pas la première fois que l’ancienne légionnaire invitait de jeunes étudiants chez elle dans le but d’entraîner sa fille. « Il faut bien que tu apprennes à contrôler ton pouvoir, Ava-May. » La logique était implacable. Néanmoins, les derniers incidents de la probatio avaient poussé sa mère à passer à la vitesse supérieure : il ne se passait pas un weekend, pas une heure de libre, sans qu’Ava ne doive séduire de parfaits inconnus. Certains jours étaient plus difficiles que d’autres mais la Commandante n’en avait rien à faire des états d’âme de sa fille et cette dernière le savait pertinemment. Elle mit dans un coin de sa tête toute la fatigue accumulée et se concentra sur Adrian. Adrian et ses boucles blondes. Adrian et son teint hâlé. Adrian et ses fossettes. Adrian, Adrian, Adrian, Adrian. Doucement, le regard du jeune homme changea. Au début, il la regardait comme il l’aurait avec n’importe quelle gamine de douze ans qui s’entraînait avec ses pouvoirs : un peu de curiosité, un peu d’anticipation, un peu de pitié aussi. Bientôt, les yeux de l’étudiant se teintèrent de douceur, d’affection et de quelque chose qui dégoûtait Ava sans qu’elle ne parvienne bien à identifier le problème. Ce n’était pas tout à fait de l’amour, pas complètement de l’attirance. Il y avait quelque chose de sale dans les yeux bleus d’Adrian, quelque chose qui la fit reculer lorsqu’il fit un pas vers elle. Sa mère, elle, ne fit aucun geste pour empêcher Adrian de s’approcher d’Ava. Il combla la distance entre eux et déposa un main timide sur la joue de l’adolescente avant qu’elle ne le repousse et que son pouvoir se dissipe. Enfin, la conclusion finale, le grand bouquet, le baisser de rideau : le regard d’Adrian se teinta de dégoût. Il regarda sa main, puis Ava, une horreur indéfinissable sur le visage déformé par un rictus mauvais. Il assassina du regard la mère d’Ava dont une étincelle faible de plaisir se reflétait dans les yeux.
« Vous êtes complètement ravagée. C’est une enfant ! »
Aurore secoua la tête, les bras croisés sur la poitrine. Une fois sur deux, l’étudiant tentait vainement de se révolter mais la voix enjôleuse de la descendante de Vénus suffisait à calmer leurs ardeurs.
« On fait comme on peut. Je vous laisse cette enveloppe et ce secret restera entre nous, n’est-ce pas ? »
Rien qu’une fois, Ava aurait aimé voir quelqu’un se révolter jusqu’au bout. Quelqu’un qui entendrait son appel à l’aide silencieux, ses supplications non-verbales. Mais son visage neutre et son regard inexpressif n’allaient pas dans ce sens, jamais. Les étudiants partaient et Ava creusait un peu plus le trou béant dans sa poitrine. Le regard sévère de sa mère ne croisa rien d’autre que le regard impassible de sa fille, ce qui avait tendance à lui faire froncer les sourcils. Elle qui avait passé sa vie à apprendre à Ava à se taire était maintenant décontenancée devant le silence qu’elle avait créé.
« File dans ta chambre. Le repas sera prêt dans une heure. »
Avec le temps, Ava avait appris à reconnaître les moments où sa mère utilisait l’enjôlement sur elle. Il y avait des inflexions discrètes dans sa façon de prononcer des syllabes, comme si ce n’était plus vraiment elle qui parlait. La voix s’infiltrait dans le cœur d’Ava avec des ondulations presque agréables. Les derniers élans de chaleur auxquels elle avait le droit.

Ava sentit une présence près d’elle. Elayne avait un sixième sens lorsqu’il s’agissait d’Ava, comme si elle avait un détecteur lui permettait d’apparaître dès que sa nièce touchait le fond. Délicatement, Elayne se laissa tomber à côté d’Ava et ouvrit son bras pour inviter sa nièce à se blottir contre elle. Ava se laissa tomber contre sa tante, ce qui apaisa quelques instants le tsunami. Elles restèrent un long moment l’une contre l’autre, silencieuses, avant qu’Ava ne finisse par prononcer quelques mots.

« Pourquoi elle m’a toujours détesté ? »

Les fêlures de son âme résonnèrent dans ses mots et le barrage céda. Ava pleura, le corps entier traversé par des tremblements incontrôlables. Elayna caressa les cheveux de sa nièce, sa nuque, son dos. Elle la serra fort contre elle avec l’espoir infini de pouvoir aspirer toutes ses souffrances, elle qui avait passé son adolescence et une partie de sa vie d’adulte à les ressentir, à les fuir, à les combattre, à les accepter.

« Je suis désolée, Ava, tellement désolée. »

Ava serra sa tante dans ses bras comme s’il s’agissait de son dernier rempart, de sa dernière chance de survie, de son unique pillier. Elle l’était, en un sens, mais Ava avait beau enfoncer ses ongles dans la peau d’Elayne, cela n’effaçait en rien le maelstrom qui se déchaînait en elle.

L’été était définitivement terminé. L’automne prenait sa place, ondulant entre les feuilles jaunies et la brume matinale. Ava hurlait sa peine en même temps que le vent qui frappait contre les volets, incontrôlable, déchaîné.

Une nouvelle saison commençait.


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