Pouvoir profiter de la piscine, c’était quand même grave cool. Et puis avoir quelques chaises longues au bord d’une piscine, c’est toujours appréciable. Il ne m’en avait pas fallu plus pour m’y trouver une place, en bikini noir, cheveux en queue haute et lunettes de soleil vissée sur le nez. Je sais, ce n’est pas très réglementaire de profiter de la vue qu’offrent des demi-dieux aussi jeunes. Mais aucun ne sera jamais en mesure de connaitre mon âge réel ! Et puis est-ce que ça compte vraiment, sachant que pendant toute une période j’ai tout simplement arrêté de vieillir ? Ça ne dérangeait pas vraiment ma dernière conquête. Ce qui l’avait le plus dérangé avait été de savoir que j’avais déserté ! En même temps, j’avais eu le chic pour m’enticher d’un romain... Mauvaise idée après avoir déserté le Camp Jupiter. Et ça pouvait sans doute la foutre encore plus mal dans l’esprit de certains parce que je suis une des marmots du “grand patron”. Oups ? Enfin je pouvais tout aussi bien porter mon regard sur des adultes après tout. Parce qu’il y avait la Nouvelle-Rome et maintenant Kolonaki donc je pouvais trouver quelque chose à me mettre sous la dent. Oui bon je sais, c’est pas très beau de le dire comme ça ! Mais quand on voit le paternel... Pardon papa mais il te fallait bien une descendance aussi libérée que toi ! Jupiter n’est pas connu pour être le plus fidèle alors même si sur ce point je ne tiens pas de lui... Je ne vois pas pourquoi je n’aurai pas le droit de m’amuser !

Ça aurait pu être bien de profiter, juste que c’était... Bondé d’enfants avec les romains qui trainaient ici. Et franchement, les mômes qui jouent en criant comme je sais pas quoi, ça a le don de me foutre les nerfs en boule. J’en ai justement un qui n’a rien trouvé de mieux que de venir littéralement hurler juste à côté de moi ! Je me levais alors d’un bon. “Non mais ça va pas bien dans ta tête toi ! T’es pas obligé de hurler comme ça quand tu joues !” J’avais au moins la présence d’esprit de retenir les vulgarités. Par contre, j’étais presque ravie d’avoir fait pleurer ce pauvre gosse. Au moins, il ne reviendra pas chouiner ici ! Je me cale donc à nouveau, remets mes lunettes de soleil et profite du calme que je retrouve pour... Même pas cinq minutes. Une mère furibonde arrive, tenant le fameux gamin par la main qui renifle.  “Non mais ça va pas de s’en prendre à un enfant !?” Je me retrouvais à lâcher un soupir en voyant la daronne furibarde. Et finalement, je me relevais en calais mes lunettes sur le haut de mon crâne. “Si vous saviez le tenir, tout le monde s’en porterait bien mieux !” Oui, je dis ce que je pense ! Bon évidemment, ça ne plait pas de s’entendre dire qu’on ne sait pas éduquer son gosse. Et allez qu’elle continue de quasiment hurler. Je crois que je sais ce qui tient le fils !

Les nerfs encore plus en boule qu’au départ, je décide de la laisser en plan. Et la voilà qui commence à sortir un vocabulaire qui n’a rien de chaste. Par tous les Dieux, faites que j’ai assez de patience pour ne pas me retourner et lui claquer dans le beignet qu’elle ne devrait pas trop chercher les Amazones, histoire de la faire paniquer un coup... J’ai clairement besoin de me détendre là ! Le sauna, ça devrait le faire. Histoire d’évacuer à grand coup de chaleur toute la tension.  J’ouvre alors la porte pour entrer... Et visiblement, la chance n’est pas de mon côté. Je lâchais alors un gros soupir. “Sérieusement, je me débarrasse d’un gosse et de sa mère qui braillent comme des babouins et je retrouve le voleur en chef !?” Non allez Rhylan, prends sur toi... Tu peux bien le supporter un peu le temps de gratter de la chaleur et de la détente ! Me pinçant l’arête du nez, j’allais donc m’installer à son opposé. “Je te préviens, si tu chapardes encore ma bague je discute plus et je t’assomme avec une décharge.” J’admets que la mise en garde et un peu violente. Mais je viens d’avoir une furieuse envie de gifler un enfant et sa mère en prime donc clairement, ne pas me chercher est une des meilleures choses à faire.

J’aurai clairement préféré ne croiser personne, encore moins Darren alors que j’avais déjà les nerfs en boule. Mais que voulez-vous, on ne peut pas toujours avoir ce qu’on veut. Cependant, il ne fallait pas espérer que mes salutations à son égard soient des plus sympathiques. Peut-être que je cherchais à le faire fuir aussi d’une certaine manière. La dernière fois que je l’avais croisé, j’avais pu constater qu’il avait un certain effet sur moi. Effet que j’avais vécu une fois avec quelqu’un d’autre et que je n’étais pas prête à revivre. Alors, j’avais préféré fuir. La fuite, c’était presque facile pour moi. J'avais fuit la Camp Jupiter et la légion comme si de rien n’était, j’avais rejoint les chasseresses... Et je les avais quitté au bout d’un moment pour rejoindre les Amazones. C’était une des rares fois où je n’avais pas choisi l’option de la fuite, où j’avais fait les choses proprement. Et voilà que la fuite me semblait à nouveau une option viable. Même si je préférais la sienne à la mienne pour le coup. Je roulais des yeux à sa réponse, en espérant que la chaleur ambiante pourrait cacher un certain émoi. D’un point de vue purement factuel, on peut presque dire que oui, il m’a passé la bague au doigt. Mais c’était pour me rendre mon bien, qu’il m’avait volé au préalable. Donc rien à voir avec ce qu’on imagine quand on parle de passer la bague au doigt de quelqu’un. On est très loin du romantisme habituel de ce genre de scène quoi.

Je m’installais quasiment à l’autre extrémité du sauna, histoire d’éviter tout contact avec lui... Et que le fils d’Hermès comprenne bien que je n’étais pas ici pour lui tailler le bout de gras. Fermant les yeux, je finis même par lâcher un petit soupir d’aise, commençant tout juste à me détendre. Adossée contre le mur du sauna, j’aurai presque pu m’endormir dans la chaleur des lieux. Manque de chance pour moi, un certain demi-dieu avait apparemment décidé qu’il voulait papoter. En entendant sa voix, je commençais à me mordiller la lèvre inférieure pour ne pas directement l’insulter de tous les noms que je pouvais connaitre. Faut dire qu’il essayait de se donner de l’importance à mes yeux... Et que je refusais d’admettre qu’il pouvait potentiellement en avoir. Je me redressais alors et plantais mon regard dans le sien. “Arrête de te prendre pour un Pokemon rare que je voudrais attraper. A la limite t’es un Marcacrin tout juste bon à te gaver de salade.” Je me pinçais l’arête du nez en fermant les yeux. J’avais peut-être été un peu loin, en sortant en plus une référence pop culture pour plus ou moins l’insulter. “Désolée... ce gosse m’a foutu lez nerfs en boule et je pensais pas te croiser ici juste après...”’ Oui bon, je sais, c’est pas dans mes habitudes de m’excuser comme ça. Mais j’avais tout intérêt à ne pas me mettre les gens à dos alors que je revenais à peine. Et puis... Etant donné ce que j’avais pu lui dire, dont il se souvenait clairement... Je n’avais rien à perdre à au moins tenter de faire connaissance avec lui, pas vrai ?

Soupirant, je me laissais à nouveau aller en arrière, mon dos se retrouvant à nouveau contre le mur. Nerveusement, je commençais à triturer ma main droite à l’emplacement de l’index manquant. J’avais malencontreusement chopé ce tic lorsque je tendais de me familiariser avec l’absence de ce doigt, qui m’avais obligé à reprendre une partie de mon apprentissage de combattante. Bon sang, je n’arrive pas à croire que je vais proposer ça. “Bon... Plutôt que de continuer à se faire la guerre à cause de la dernière fois... Je te propose une sorte de... De trève on va dire.” Vous allez me dire, une trève c’est rien. Sauf que j’ai autre chose à proposer. “Tu promets de ne rien chaparder, je promets de ne pas te balancer une décharge électrique et peut-être qu’on pourrait faire plus ample connaissance pour au minimum tenter de s’entendre.” Je plaide coupable, j’ai une certaine curiosité à assouvir à son sujet. Et puisqu’il m’intéresse au moins un peu, j’aime autant ne pas faire la même erreur que la dernière fois. Je lui tendais alors ma main droite, en espérant qu’il la serre. “Deal ?”

Retrouver Darren ici n’avait pas été à mon goût, je dois bien le reconnaitre. Et je ne suis pas particulièrement tendre non plus pour le coup. Il faut dire que quand j’ai les nerfs en boule, tout le monde a tendance à en prendre pour son grade. C’est pour ça que d’habitude, je m’isole dans ces circonstances. Mais là, il n’aurait pas été très bien vu de faire demi-tour uniquement parce que j’avais constaté la présence du fils d’Hermès. J’avais donc opté pour la comparaison à un Pokémon, évidemment pas celui à l’apparence la plus reluisante. Mais le bougre savait manier les mots. Je dû même me retenir de pouffer en entendant sa comparaison. Cela dit, je ne sais pas si je dois me sentir flatter d’être comparée à Voltali (il faut bien le dire, il a la classe quand même, comme toutes les évolutions d’Evoli) ou si je dois me sentir outrée qu’on me trouve aussi mignonne qu’un chaton. Parce que tout de même, je reste une Amazone et en prime, je ne suis pas vraiment connue pour ma douceur. Non, je suis plutôt celle qui fonce dans le tas et qui aime bien dégommer du monstre. Il suffit de voir ce que j’avais pu faire face à une armée de zombies dans le Labyrinthe. Au moins, j’avais vengé la perte de mon index avec succès !

Je me retrouvais cependant à m’excuser. Après tout, j’avais choisi de rester ici plutôt que de fuir. J’étais donc plus ou moins responsable de mon propre énervement. Mais le jeune homme continuait sur sa lancée de boutade, ce qui me fit rouler des yeux... Et eu le mérite d’au moins me faire sourire cette fois. Il a raison, je ne suis pas du genre à m’excuser pour si peu. Mais bon, comme on dit il n’y a que les idiots qui ne changent pas d’avis. “J’ai juste pu passer mes nerfs sur quelques monstres en allant récupérer un ou deux objets magiques si tu veux tout savoir !” Vous pensiez vraiment que je m’étais tournée les pouces pendant mon absence ? Bien sûr que non ! Ce n’est un secret pour personne que je suis du genre à ne pas tenir en place. Alors évidemment, une fois que j’ai pu me débrouiller presque comme avant au maniement de mon arme je n’ai eu aucun mal à retourner m’amuser un peu dans le monde extérieur. Ça m’avait fait du bien, je dois le reconnaitre. J’avais un peu l’impression d’être devenue inutile. Alors j’ai pu plus ou moins redorer mon blason et me sentir un peu mieux avec tout cela.

De le voir se lever de la sorte m’intrigua. Mais le pire fut lorsqu’il prit ma main. Je ne pouvais toujours pas lutter contre le malaise que je ressentais lorsque quelqu’un touchait ma main droite. Parce que moi-même je peine encore à me faire à la situation après tout ce temps. Certains peuvent être dégoutés, d’autres intrigués. Par-dessus tout, je refuse qu’on me témoigne de la pitié pour cela. Perdre ce petit bout de moi, c’était mon choix. Sans doute aussi un peu de crainte de ce qui aurait pu se passer si tout mon corps avait été recouvert par l’étrange substance. En somme, pas de quoi me rendre fière de moi. J’aurais très bien pu rester totalement figée dans ce Labyrinthe si j’avais accepté de ne rien faire. Ça aurait été une disparition des plus honorables pour une Amazone. Enfin je ne peux pas revenir là-dessus... Et l’absence de mon index m’y renvoie pourtant assez régulièrement. Je penchais légèrement la tête face à la remarque de Darren. “Je suis pas du genre à risquer la vie des enfants mortels. Et lui, je n’avais aucune idée de ce qu’il était. Toi, t’es un demi-dieu. Un coup d’ambroisie et le tour est joué !” D’autant plus que lorsque je balance une décharge à un demi-dieu, je veille toujours à ne pas y aller trop fort. Il ne faudrait pas les tuer non plus. “Bon par contre... Je sais pas toi mais moi, j’ai bien besoin d’aller me rafraichir un coup.” Je me levais alors et m’étirais. Rester dans la chaleur comme ça, ça a le don de m’endormir ! J’avoue que j’irai bien piquer une tête.